La France hausse le ton sur la stratégie de la Commission européenne et de l’Allemagne de négocier la hausse des droits de douane américains de 30 % qui doit s’appliquer à partir du 1er août. Ce mardi, le ministre français de l’Industrie Marc Ferracci a reçu les grandes filières industrielles du pays, inquiètent d’un accord inéquitable, à la veille d’une rencontre entre le président Emmanuel Macron et le chancelier allemand, Friedrich Merz.
L’horloge tourne et la date fatidique du 1er août arrive à grand pas. A Bruxelles, les négociations se poursuivent depuis l’annonce du 12 juillet dernier d’un taux de droit de douane américain de 30 % sur les produits européens. La semaine dernière, le commissaire européen au Commerce s’est rendu à Washington pour de nouvelles négociations, en vain.
Dès lors à Paris, un certain agacement se fait ressentir avec cette envie de montrer plus de fermeté. Ce mardi, le ministre français de l’Industrie et de l’Energie, Marc Ferracci, a réuni à Bercy un Conseil national de l’industrie exceptionnel. Était présents : l’ensemble des filières industrielles du pays venus « construire une position commune de l’industrie française sur la posture européenne dans les négociations commerciales en cours entre la Commission européenne et l’administration Trump ».
« Il faut rentrer dans un rapport de force avec Donald Trump »
« La position de l’Europe doit être une position de négociation, mais également une position de fermeté », a déclaré le ministre à la sortie du Conseil, réjoui du consensus trouvé entre les différents représentants. « Nous avons, en particulier, dit qu’il fallait déclencher un certain nombre de mesures de riposte dans l’hypothèse où l’accord n’était pas trouvé d’ici au 1er août », a-t-il ajouté.
Pour Thomas Grjebine, responsable du programme « Macroéconomie et finance internationales » au Centre d’études prospectives et d'informations internationales (CEPII), la stratégie française est la bonne face à un président américain qui ne connaît que la force : « Il faut rentrer dans un rapport de force avec Donald Trump sinon le résultat sera forcément défavorable », explique l’économiste. « Il faut donc durcir le jeu, mais pour cela il faut avoir les reins suffisamment solides, car il risque de surenchérir et tester si l’unité européenne tient dans ce cadre ».
« Donald Trump sait qu’il est compliqué pour l’Europe de rester unie et de prendre des décisions communes »
Le bras de fer s’annonce donc tout aussi tendu entre la France et l’institution européenne, qu’avec les Etats-Unis. Dès demain, Emmanuel Macron se rend en Allemagne pour échanger avec le chancelier Friedrich Merz. A n’en pas douter, le sujet d’une négociation ou d’un affrontement frontal avec Donald Trump devrait être au cœur des discussions. Le chancelier allemand lui souhaite faire pression sur les États-Unis pour aboutir à un accord de négociation rapide, protégeant l’économie allemande. Du côté de Bercy, certains craignent qu’un accord inéquitable conduise à la perte de confiance européenne des entreprises.
En mai dernier, interrogé par Public Sénat, l’économiste et spécialiste du commerce international, Vincent Vicard définissait la stratégie de Donald Trump comme un « test sur la capacité des Européens à faire front et à répondre de manière collective ».
« Je ne sais pas si c’est une stratégie consciente », répond Thomas Grjebine. « Ce qui est sûr c’est que Donald Trump sait qu’il est compliqué pour l’Europe de rester unie et de prendre des décisions communes. On le voit très bien ici ».