L’Assemblée nationale a très largement rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2026 : seul un député a voté pour, 404 ont voté contre et 84 se sont abstenus.
En France, c’est inédit dans l’histoire de la Vᵉ République, la quasi-totalité de l'Assemblée nationale a rejeté dans la nuit de vendredi à samedi le budget de l’État, après 125 heures de débats souvent houleux. 404 députés ont rejeté la partie « recettes » du texte (un pour, 84 abstentions), faisant tomber l’ensemble du projet de loi, sans même étudier la partie « dépenses ».
Les groupes de gauche et le Rassemblement national (RN) ont voté contre, ceux du camp gouvernemental se sont divisés entre votes contre et abstentions. Seul à voter pour, le député du groupe centriste Liot Harold Huwart. L'Assemblée nationale avait déjà rejeté en 2024 le budget de l’État, de manière inédite sous la Vᵉ République. Mais c’est une première qu’il le soit avec une telle ampleur.
Face à ce revers historique, la ministre de l’Action et des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a défendu un « travail utile », tout en dénonçant des mesures « inconstitutionnelles, irréalistes ou inapplicables » introduites par les oppositions. Sur X, elle a fustigé « l’attitude cynique » des « extrêmes ». Dans le camp présidentiel, Paul Midy évoque « des horreurs économiques », tandis que le Premier ministre, Sébastien Lecornu, a déploré « des coups tactiques des extrêmes qui rendent la copie insincère ».
Les hausses d’impôts votées par l’Assemblée – comme l’« impôt universel » sur les multinationales ou la majoration de la taxe sur les rachats d’actions – ont cristallisé les tensions. Selon Amélie de Montchalin, elles feraient passer le déficit à « 4,1 % » du PIB, mais resteraient « fragiles ». Pour Eric Coquerel, le gouvernement a présenté un texte comme s’il était « majoritaire ». Marc Fesneau estime au contraire que « chacun doit prendre une part » dans l’effort budgétaire.
Le RN accuse l’exécutif de préparer un passage en force « par ordonnances ou par un 49.3 ». Le Parti socialiste (PS), qui espérait obtenir une mesure de justice fiscale, juge que « le compte n’y est pas ». De son côté, Boris Vallaud a dénoncé « l’intransigeance d’une partie du bloc central », même si les socialistes affirment vouloir « chercher le compromis ».
Le texte arrive désormais au Sénat, qui reprendra jeudi l’examen sur la base du projet initial. Son adoption avant la fin de l’année apparaît très incertaine, malgré un Premier ministre qui martèle qu’« il faut que cela fonctionne ».
Philippe Juvin, membre du parti Les Républicains et rapporteur général du budget, a invité le gouvernement à recourir au 49.3 pour éviter une impasse. À défaut, une « loi spéciale » pourrait garantir la continuité fiscale, un scénario que Sébastien Lecornu dit ne pas privilégier.