Après la récente réunion à la Maison-Blanche entre Donald Trump et les principaux dirigeants européens, le président Emmanuel Macron a accordé, mardi 19 août, une interview exclusive à TF1-LCI. Les propos du président français à l’encontre de la Russie – qu’il a dépeinte comme « un prédateur, un ogre à nos portes » – ont vivement fait réagir des personnalités politiques africaines, qui perçoivent dans ces accusations françaises un descriptif du comportement de Paris à l’égard de leur continent.
« C’est l’hôpital qui se moque de la charité », a réagi auprès de RT Serge Espoir Matomba, fondateur et Premier secrétaire du parti Peuple uni pour la rénovation sociale (PURS), après la diffusion de l’interview d’Emmanuel Macron.
« Quand on sait ce que la France a fait en Afrique, quand on sait ce que la France a mené comme combats et dominations en Afrique, on a envie de se poser la question : “qui est le vrai prédateur ?” », a poursuivi cet homme politique et entrepreneur camerounais, renvoyant notamment à la lettre adressée cet été par Emmanuel Macron à son homologue camerounais Paul Biya.
Une lettre rendue publique mi-août, dans laquelle le locataire de l’Élysée reconnaît qu’« une guerre » a eu lieu au Cameroun entre 1955 et 1971 et au cours de laquelle « les autorités coloniales et l’armée française ont exercé plusieurs types de violences répressives dans certaines régions du pays ».
« Comment ce pays peut-il qualifier aujourd’hui la Russie de pays prédateur ? », a insisté Serge Espoir Matomba. « Qui est aujourd’hui le pays qui embrigade plusieurs pays africains francophones ? C’est la France, ce n’est pas un autre pays ! », a-t-il enchaîné.
« La France est le vrai prédateur, c’est le pays qui s’est nourri du sang de ses anciennes colonies africaines », a également réagi Aliou Tounkara, député du Conseil national de transition du Mali.
« La France se bat contre la souveraineté des pays africains »
Dans son interview, le président français a par ailleurs accusé la Russie d’avoir « rarement tenu ses engagements ».
« Quand on veut parler de promesses ou d’engagements, la France est mal placée pour en parler », a réagi sur ce point Serge Espoir Matomba, évoquant l’« engagement d’indépendance non respecté » par Paris à l’égard des nations africaines.
« Les pays africains aspirent à une véritable souveraineté, la France se bat contre la souveraineté des pays africains », a martelé l’homme politique camerounais, pointant notamment du doigt le franc CFA, cette monnaie « contrôlée par la Banque de France, qui est un véritable poste de péage scandaleux sur les économies africaines ! », a abondé Franklin Nyamsi, président de l’Institut de l’Afrique des Libertés.
« Nous sommes choqués », a-t-il enchaîné, « d’entendre de la bouche du président français [...] une terminologie qui est une autodescription du néocolonialisme, du colonialisme français ».
Une « politique d’immixtion, d’ingérence, du néocolonialisme émanant de l’Élysée », également dénoncée par Laddy Yangotikala Senga, député national à l’Assemblée nationale congolaise. « C’est lui qui s’ingère dans la gouvernance des différentes institutions africaines », a-t-il fustigé. « La preuve en est que le Burkina Faso, le Mali, le Niger ne veulent même plus entendre parler d’Emmanuel Macron », a-t-il ajouté.