S’exprimant vendredi 7 mars au Parlement, le Premier ministre polonais Donald Tusk a déclaré que Varsovie envisageait d’accéder aux armes nucléaires et de mettre en place un programme de formation militaire dans le but de constituer une armée de 500 000 hommes pour faire face à ce qu’il a considéré comme « la menace de la Russie ».
L’expansion militaire spectaculaire de la Pologne intervient alors que l’Europe craint de plus en plus que le président américain Donald Trump ne s’aligne sur le Kremlin et ne tourne le dos aux alliances occidentales traditionnelles des États-Unis — un changement géopolitique que Varsovie considère comme une menace potentiellement existentielle.
M. Tusk a déclaré que la Pologne « discute sérieusement » avec la France de la possibilité d’être protégée par le parapluie nucléaire français. Le président français Emmanuel Macron a ouvert la possibilité que d’autres pays discutent de la manière dont la dissuasion nucléaire française peut protéger l’Europe.
Le Premier ministre polonais a déclaré que Varsovie ne pouvait pas se limiter aux armes conventionnelles.
« Nous devons être conscients que la Pologne doit se doter des capacités les plus avancées, y compris celles liées aux armes nucléaires et aux armes non conventionnelles modernes. Il s’agit d’une course à la sécurité, et non à la guerre », a-t-il indiqué.
À cet égard, il a cité l’exemple de l’Ukraine, qui a renoncé à son arsenal nucléaire et qui est désormais, selon lui, attaquée par la Russie.
Ailleurs dans ses remarques, il a mis l’accent sur le renforcement des forces militaires de la Pologne.
« D’ici la fin de l’année, nous voulons disposer d’un modèle pour que tous les hommes adultes de Pologne s’entraînent à la guerre […] pour faire face à d’éventuelles menaces », a déclaré M. Tusk.
Ces remarques tombent alors que l’armée polonaise compte aujourd’hui environ 200 000 hommes, ce qui en fait la troisième plus grande armée de l’OTAN après les États-Unis et la Turquie et la plus importante parmi les membres de l’UE.
Aujourd’hui, la peur croissante de la Russie, ajoutée à l’inquiétude concernant la fiabilité de l’alliance traditionnelle de la Pologne avec les États-Unis, suscite une révolution dans la planification militaire.
Cependant, Donald Tusk a rejeté le retrait de la Pologne de l’OTAN, en expliquant que Varsovie ne change pas d’avis sur la nécessité fondamentale de maintenir les liens les plus étroits possible avec Washington et l’OTAN.
La Pologne est déjà le pays le plus dépensier de l’OTAN, son budget de défense représentant 4,7 % du produit intérieur brut (PIB) cette année. M. Tusk a déclaré au parlement que les dépenses devraient passer à 5 % du PIB, un chiffre vanté par le président américain.
Par ailleurs, il a estimé que l’Europe dispose du potentiel économique nécessaire pour s’opposer à la Russie.
« Notre déficit a été le manque de volonté d’agir, le manque de confiance, et parfois même la lâcheté. Mais la Russie sera impuissante face à une Europe unie », a indiqué le Premier ministre polonais, ajoutant : « En ce moment, 500 millions d’Européens supplient 300 millions d’Américains de les protéger contre 140 millions de Russes qui n’ont pas réussi à vaincre 50 millions d’Ukrainiens pendant trois ans ».
En outre, il a déclaré que la Pologne prendrait des mesures pour se retirer des traités internationaux interdisant l’utilisation de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions.
Malgré le renforcement militaire prévu, Donald Tusk a insisté sur le fait que les troupes polonaises ne seront pas envoyées en Ukraine pour surveiller un éventuel accord de paix.
« La mission de la Pologne consiste à garder sa frontière orientale, qui est aussi la frontière de l’OTAN et de l’Union européenne », a-t-il déclaré.