Neuf mois après son arrivée à l'Élysée, le président français Emmanuelle Macron a-t-il changé la nature des relations irano-françaises ? Non. Mais qu'est-ce qui bloque une vraie reprise ?
Selon Fereydoon Majlesi, l’ancien ambassadeur iranien en Allemagne et expert en affaires internationales, l’Europe a tendance à profiter de l’accord sur le nucléaire iranien (PGAC) pour développer ses exportations vers l'Iran et le secteur industriel français n'échappe pas à cette règle.
Total a fait hardiment et avec détermination, son entrée au Pars-sud (plus grand champ gazier du monde, NDLR) ou encore Peugeot et Citroën ont repris leurs activités en Iran. Mais les signes d'une entière normalisation des relations peine toujours à se manifester. Les États européens dont la France sont sous pression, sur le plan intérieur par les lobbies sionistes, et sur le plan international par la Maison Blanche.
Pour M. Majlesi, contrairement à ce qu’on prévoyait avant la prise de fonction d’Emmanuel Macron, "il n’y a pas eu de reprise dans le vrai sens du terme entre l'Iran et la France. Les relations ne se sont pas détériorées mais on est loin, bien loin du réchauffement tant attendu. Même la visite de Jean-Yves Le Drian n’a rien changé au froid qui règne sur le climat des liens Téhéran-Paris".
Pourquoi ?
Selon l'ancien diplomate, la France ne voudrait ou ne pourrait vexer Washington et Tel-Aviv qui sont ses principaux alliés. La France soutient l’accord sur le nucléaire iranien mais ne prend aucune mesure efficace pour contrer les parties qui entravent les activités des banques et des entreprises iraniennes.
Il y a là d’ailleurs un paradoxe assez incompréhensible pour les Iraniens puisqu'à vrai dire, le PGAC n'a jamais été appliqué par les Américains. La France le sait très bien et sur cette base, elle sait aussi qu'une renégociation de l’accord n’a pas de sens. Et pourtant, elle exige que l'accord soit "complété par une annexe balistique, alors qu'il s'agit d'un texte entier, internationalement reconnu et signé tel quel, qui ne devra à aucun prix faire l'objet d'une révision", explique le diplomate.
Concernant les alliés du golfe Persique, l’expert indique qu’en effet, les parties européennes ont tendance à travailler avec l’Iran mais remuent ciel et terre pour maintenir le marché que représente pour eux les pays du golfe Persique. "D'où cette impression d'inconstance et de fluctuation qui émane de leur politique envers l'Iran. Pourtant il va falloir, un moment ou un autre, faire son choix et ce choix devra s'effectuer logiquement en fonction du poids des pays de la région", indique-t-il.
L’ancien diplomate conclut en évoquant le changement de position de Macron envers l'Iran peu de temps après sa prise de position. Pour Emmanuel Macron d’avant les présidentielles, l’Iran et la Russie faisaient partie de la "solution au conflit en Syrie" mais pour celui d’après l'investiture, le rôle régional iranien pose problème. "C'est à ce paradoxe qu'il faudrait travailler avant tout", ajoute M. Majlesi.