La paralysie budgétaire qui frappe les États-Unis depuis vingt jours s’étend désormais jusqu’à l’arsenal nucléaire: près de 80% du personnel de l’agence chargée des ogives sera mis au chômage technique. Alors que plus de 700 000 fonctionnaires sont déjà à l’arrêt, Donald Trump accuse les démocrates de « cinglerie » et promet une issue rapide au blocage.
L’agence de sécurité nucléaire nationale, la NNSA, doit mettre quelque 1 400 fonctionnaires fédéraux au chômage technique, tandis que moins de 400 resteront en poste pour assurer la maintenance des ogives nucléaires américaines durant ce « shutdown », a affirmé vendredi Ben Dietderich, porte-parole du ministère de l’Énergie à la chaîne CNN.
L’élu républicain Mike Rogers, qui préside la commission des forces armées à la Chambre des représentants, avait déclaré le même jour avoir été informé que la NNSA était « sur le point d’épuiser les fonds de secours qu’elle utilisait » et de mettre au chômage technique 80 % de son personnel. « Ce ne sont pas des employés que vous voulez voir rentrer chez eux », avait-il ajouté.
Depuis le 1er octobre et l’expiration du budget des États-Unis, les républicains de Donald Trump et l’opposition démocrate ne parviennent pas à s’entendre pour sortir du « shutdown ».
Interrogé lors d’une conférence de presse sur la question nucléaire, le chef républicain de la Chambre, Mike Johnson, a affirmé lundi que « chaque jour que l’État est paralysé est un danger pour le peuple américain ».
Selon les estimations du cercle de réflexion Bipartisan Policy Center, plus de 700 000 fonctionnaires fédéraux sont déjà au chômage technique sans rémunération. Près de 700 000 autres continuent eux de travailler sans être payés non plus jusqu’à la fin du blocage.
Sans issue en vue, le blocage actuel est déjà le troisième plus long de l’histoire des États-Unis et se rapproche lentement mais sûrement du record de 35 jours, établi en 2019, déjà sous Donald Trump. Les républicains proposent de prolonger le budget actuel, avec les mêmes niveaux de dépenses, tandis que les démocrates réclament une prolongation de subventions pour des programmes d’assurance santé à destination de ménages à bas revenus.
Le chef de la minorité démocrate à la Chambre, Hakeem Jeffries, a souligné lundi l’importance de l’échéance du 1er novembre, date à laquelle d’importants changements dans les polices d’assurance santé des Américains prendront effet. Pour l’élu new-yorkais, si le problème des subventions n’est pas résolu avant cette date, « des dizaines de millions de gens à travers le pays se rendront compte que leurs primes, coûts, et franchises d’assurance santé auront explosé », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse.
En raison des règles en vigueur au Sénat, même si les républicains y sont majoritaires, plusieurs voix démocrates sont nécessaires pour adopter un budget. Mais Donald Trump rejette toute négociation sur les questions de santé sans « réouverture » préalable de l’État fédéral.
Pour tenter de faire céder des sénateurs de l'opposition, Donald Trump a multiplié les menaces de suppression de « programmes soutenus par les démocrates », assurant que le blocage était une « grosse erreur » de leur part.
La Maison Blanche a ainsi affirmé avoir l'intention de limoger au moins 10.000 fonctionnaires fédéraux pendant ce « shutdown », avant qu'une juge fédérale ne suspende jeudi ceux déjà annoncés.
Cette paralysie budgétaire de l'État fédéral coïncide avec l’organisation de mobilisation nationale de grande envergure à travers les États-Unis.
De New York à San Francisco en passant par Chicago et La Nouvelle-Orléans ou encore dans de petites villes du centre des États-Unis, environ 7 millions de personnes ont pris part samedi 18 octobre à plus de 2700 rassemblements à travers le pays.
Des Américains de tout âge se sont mobilisés en fin de semaine pour dénoncer ce qu'ils qualifient de « prise du pouvoir autoritaire » de Donald Trump et de ses proches.
Diverses pancartes montrant Donald Trump dépeint en Staline, en reine d'Angleterre ou encore en Roi Soleil ont été observées dans les cortèges, où résonnaient des chants appelant Trump à quitter le pouvoir.
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