Dans une tribune publiée ce mercredi 5 mars par le quotidien iranien Ettela'at, le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi a affirmé que la République islamique avait fait un « choix conscient » pour préserver son indépendance.
M. Araghchi a déclaré que le pays avait opté pour la voie de l’autonomie, afin de ne pas être lié à une dépendance vis-à-vis d’alliances géopolitiques instables, telles qu’illustrées récemment par la rencontre très médiatisée dans le bureau ovale entre le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président américain Donald Trump.
Des années durant, Washington s’est présenté comme le centre de décision du monde occidental. Mais aujourd’hui, cette centralité est remise en cause, a écrit le haut responsable iranien en référence à la prise de bec au cœur de la Maison-Blanche la décrivant comme le signe des incertitudes stratégiques et diplomatiques et des divergences non résolues au sein du bloc occidental.
L’un des messages clés de cette controverse, écrit-il, est le changement du positionnement de l’Ukraine dans l’équation du pouvoir. Au début de la guerre, Zelensky comptait plus que jamais sur l’aide occidentale. Mais aujourd’hui, en pleine Maison-Blanche, il se dresse devant le président américain et lui livre une réponse cinglante. C’est le signe même d’une évolution significative dans la politique étrangère américaine, marquée par un changement de posture de la part des nations bénéficiant traditionnellement du soutien de Washington. L’Ukraine, qu’elle soit considérée comme un acteur indépendant ou comme un pion sur l’échiquier des puissances mondiales, a démontré que même les alliés les plus modestes sont prêts à payer le prix de leur dignité et de leur statut.
« L’une des grandes questions est la suivante : « Le continent [européen] restera-t-il uni dans son soutien à l’Ukraine ? […] La France, l’Allemagne et d’autres alliés européens ont adopté une position plus prudente concernant la guerre en Ukraine depuis le début. Les différences en matière de politique de défense et de sécurité existent depuis le début. Aujourd’hui, avec la querelle verbale entre la Maison-Blanche et Zelensky, ces différences sont clairement visibles. »
« Les Européens, qui se sont montrés plus prudents à l’égard des développements en Europe de l’Est depuis le début, sont désormais confrontés à une nouvelle question : Washington a-t-il encore la force et la volonté de mener un front uni à l’Ouest ? », s’est-il encore interrogé.
La voie de la sagesse et du tact, le choix conscient de l’indépendance
Dans ce contexte délicat, a écrit M. Araghchi, la République islamique d’Iran analyse avec une attention et une circonspection particulières les récents développements. Certes, la confusion dans la politique internationale peut avoir des conséquences néfastes sur la stabilité et la sécurité mondiales. Et c’est pourquoi l’Iran, contrairement à d’autres acteurs qui s’impliquent dans des tensions verbales et des politiques hâtives, a toujours adopté une approche différente, privilégiant des principes de respect mutuel, d’indépendance et d’éviter les discours non constructifs.
« L’indépendance de l’Iran n’est pas un hasard ou le résultat de circonstances imposées ; c’est plutôt un choix conscient, une décision stratégique et un principe immuable dans la politique étrangère du pays ».
Si certains pays ont pu chercher leur sécurité et leur stabilité dans la dépendance à l’égard de puissances étrangères, l’Iran a, depuis longtemps, réalisé que la dépendance ne mènerait qu’à l’instabilité et à la perte de souveraineté nationale, a ponctué M. Araghchi.
« La véritable sécurité ne vient pas du soutien de puissances extra-régionales, mais des capacités nationales, de la confiance dans les capacités nationales et de la confiance dans le peuple. Et c’est pourquoi l’Iran a choisi une voie différente, une voie dans laquelle le destin du pays ne dépend pas des décisions des autres, et où les politiques sont élaborées en fonction des intérêts nationaux, et non dans l’ombre des conseils étrangers », a-t-il fait remarquer.
Toutefois, préserver l’indépendance a un prix que l’Iran a toujours payé, a déclaré M. Araghchi.
« Dès les premiers jours de la Révolution islamique d’Iran, les pressions économiques, les sanctions, les menaces militaires et les guerres par procuration ont toutes été conçues pour transformer l’Iran en un acteur subordonné dans le système international. Mais l’Iran a tenu bon et a montré que non seulement il ne cédait pas aux pressions, mais qu’il poursuivait son chemin de développement et de progrès en s’appuyant sur ses capacités nationales".
« Ce choix conscient est devenu un principe : l’Iran n’achète pas sa sécurité, mais la construit. Nous ne dépendons pas des autres pour nous soutenir, mais nous nous défendons en nous appuyant sur nos connaissances, notre puissance et nos capacités nationales. »
L’indépendance n’est pas un simple slogan, mais une nécessité inévitable, a poursuivi M. Araghchi, ajoutant que cette vision de la politique étrangère a conduit l’Iran à ne se laisser influencer ni par les promesses étrangères ni par les menaces de ses ennemis.
L’Iran, a-t-il déclaré, s’appuie sur sa puissance nationale, son progrès indépendant et sa résistance aux pressions extérieures.
« Dans un monde où les puissances sont constamment engagées dans des conflits et des compétitions instables, l’Iran, grâce à la stabilité de ses politiques, a montré que la dépendance envers les autres n’est pas seulement un danger, mais aussi une erreur stratégique. C’est la leçon que l’histoire nous a enseignée à maintes reprises, et nous l’avons non seulement préservée, mais nous la transmettrons également aux générations futures », a-t-il enchéri.
Moscou ; observateur ou concepteur
En ce qui concerne la Russie, M. Araghchi a noté que la guerre en Ukraine a donné à ce pays l’occasion de développer une perspective différente à l’égard des alliances internationales, en s’affranchissant des États-Unis.
La guerre en Ukraine et les derniers développements ont donné à la Russie l’occasion de mieux planifier son jeu sur plusieurs fronts. D’un côté, la coopération stratégique de la Russie avec la Chine s’étend et, de l’autre côté, le Kremlin tente de modifier l’équilibre des forces au niveau international en renforçant ses relations avec les pays en développement. Les interactions économiques accrues avec les pays BRICS, l’élargissement de la coopération en matière de sécurité avec les partenaires régionaux et les efforts visant à réduire la dépendance au système financier occidental sont révélateurs de l’approche de Moscou face aux évolutions. mondiales.