Les titres de la rédaction :
Les analyses de la rédaction :
1. L’échec de la CÉDÉAO face à l’essor souverainiste de l’AES
Le 15 décembre 2024, les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CÉDÉAO) se sont réunis à Abuja pour leur 66ᵉ sommet ordinaire. Cependant, cette rencontre s’est déroulée dans une atmosphère pesante, marquée par l’émergence de l’Alliance des États du Sahel (AES), qui redéfinit les contours de l’intégration régionale et de la coopération entre pays africains.
La CÉDÉAO, souvent critiquée pour son alignement sur des intérêts extérieurs et son incapacité à résoudre efficacement les crises régionales, fait face à un défi existentiel. L’annonce par le Mali, le Burkina Faso et le Niger — membres fondateurs de l’AES — de leur retrait imminent de la CÉDÉAO remet en question la pertinence et l’efficacité de cette organisation.
Le Mali, Burkina Faso et Niger ne seront plus membres de la CÉDÉAO à partir du 29 janvier 2025. Les chefs d’État de la CÉDÉAO ont pris acte de leur notification de départ lors de leur sommet ce dimanche au Nigeria. Une période de 6 mois de transition va s’ouvrir à partir du 29 janvier. À la fin de celle-ci, la sortie de ces 3 pays sera complète.
Malgré ses ambitions d’intégration économique et de libre circulation, la CÉDÉAO a été perçue par nombre de citoyens comme une institution à la solde des puissances occidentales, intervenant principalement pour protéger des intérêts étrangers plutôt que ceux des peuples de la région. Les sanctions imposées à certains États membres, comme le Mali ou encore la volonté de l’institution de vouloir attaquer militairement le Niger ont exacerbé les tensions et alimenté le rejet de l’organisation.
En opposition à la CÉDÉAO, l’AES s’affirme comme une entité résolument panafricaine, plaçant la souveraineté des États au cœur de sa vision. Le 14 décembre 2024, à Bamako, l’AES a proclamé l’ouverture de ses frontières à tous les ressortissants des pays membres de la CÉDÉAO, sans exiger de visa. Ce geste symbolique, porté par le Président de la Confédération, le Général Assimi Goïta, reflète une volonté de créer un espace régional fondé sur la solidarité et la libre circulation.
En établissant un cadre où coexistent souveraineté nationale et coopération régionale, l’AES répond aux aspirations des populations locales, lassées par des décennies de promesses non tenues de la part de la CÉDÉAO. Les documents unifiés de voyage et d’identité prévus par l’AES témoignent de son engagement à promouvoir une véritable intégration régionale, tout en respectant les spécificités nationales.
Malgré les efforts des médiateurs comme Bassirou Diomaye Faye et Faure Gnassingbé pour rétablir le dialogue avec les États membres de l’AES, la CÉDÉAO semble incapable de proposer des solutions novatrices. L’accent mis sur la transition politique en Guinée ou sur des rapports bureaucratiques masque mal l’absence d’une stratégie claire face à l’ascension de l’AES.
Le projet d’intégration régionale porté par la CÉDÉAO est aujourd’hui menacé par une déconnexion croissante entre ses ambitions affichées et les réalités sur le terrain. En refusant de reconnaître les erreurs passées, notamment sa gestion des crises politiques et économiques, la CÉDÉAO risque de s’enliser davantage dans l’immobilisme.
L’émergence de l’AES marque un tournant dans l’histoire de l’Afrique de l’Ouest. En se retirant de la CÉDÉAO, le Mali, le Burkina Faso et le Niger réaffirment leur rejet des modèles imposés par des institutions perçues comme instrumentalisées par des intérêts extérieurs. Cette dynamique offre une opportunité unique de redéfinir les bases de l’intégration régionale sur le continent.
L’AES, avec sa vision d’un espace régional sans visa et son engagement envers la souveraineté, incarne un modèle novateur qui pourrait inspirer d’autres régions d’Afrique. Pour rester pertinente, la CÉDÉAO devra non seulement repenser ses priorités, mais aussi s’aligner sur les attentes des peuples ouest-africains en matière de dignité, de justice et de solidarité. Faute de quoi, elle risque de devenir une relique du passé, supplantée par des organisations plus audacieuses et visionnaires comme l’AES.
2. Les projets prometteurs de l’AES en matière de souveraineté alimentaire
L’ONG Ensemble Main dans la Main Niger-Russie (EMMNR) a récemment organisé une conférence internationale majeure à l’hôtel Radisson Blu de Niamey. Cette rencontre, axée sur le thème « Souveraineté alimentaire des pays de l’AES : Enjeux, Défis et Perspectives », a mis en évidence les priorités stratégiques des États membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) – Burkina Faso, Mali et Niger. L’objectif principal était de trouver des solutions concrètes pour réduire la dépendance alimentaire extrême de la région, où environ 90 % des produits alimentaires de consommation courante sont importés. Cette situation entraîne des pertes annuelles colossales de milliers de milliards de FCFA, fragilisant encore davantage les économies locales déjà touchées par des crises climatiques et sécuritaires.
Amadou Tidjani Maman, responsable de la communication de l’ONG EMMNR, a souligné l’urgence de mener une réflexion approfondie et concertée. « Après plus de soixante ans d’indépendance, les pays sahéliens n’ont toujours pas atteint une totale souveraineté alimentaire. Pourquoi continuons-nous à importer la majeure partie de ce que nous consommons alors que nous disposons de ressources abondantes ? », a-t-il demandé.
La conférence, qui a rassemblé plus de 250 participants incluant des experts, étudiants, cadres et membres de la société civile, a permis de proposer des solutions novatrices pour surmonter ces blocages systémiques.
Dr Abdel Kader Naino Jika, enseignant-chercheur à l’Université Abdou Moumouni de Niamey, a présenté un exposé percutant sur le potentiel agricole inexploité des pays de l’AES. Avec près de 300 000 hectares propices à la culture de dattiers, des nappes phréatiques abondantes et des opportunités agricoles immenses, le Niger pourrait s’inspirer de pays comme l’Égypte. Cependant, la centralisation excessive des financements et l’absence de politiques inclusives entravent les progrès. Dr Naino a appelé à une gestion décentralisée des ressources et à la mise en place de systèmes adaptés aux réalités locales.
Fatimata Segda, ingénieure agroalimentaire, a mis en avant une stratégie en trois volets pour relever les défis alimentaires au Burkina Faso :
Produire et consommer localement : investir dans des filières comme le manioc, la banane plantain et le lait, tout en améliorant les systèmes d’irrigation.
Diversifier les produits importés : garantir l’accès continu à des denrées essentielles non produites localement, en diversifiant les sources d’approvisionnement.
Renforcer la coopération régionale : mettre en place des accords commerciaux régionaux et promouvoir des produits locaux via des initiatives de labellisation et de normes de qualité.
Elle a également souligné l’importance d’intégrer la sécurité sanitaire des aliments dans toute stratégie de souveraineté alimentaire.
Dr Fatoumata Tounkara, experte en sciences alimentaires, a partagé les stratégies du Mali pour atteindre la souveraineté alimentaire. Malgré une agriculture principalement basée sur des pratiques traditionnelles, le Mali dispose de ressources hydriques importantes avec les fleuves Niger et Sénégal. Toutefois, les inégalités d’accès à la terre et la faiblesse des infrastructures agricoles limitent les rendements.
Un soutien accru à l’agriculture familiale, essentielle pour nourrir les populations rurales.
La diversification des cultures, incluant des produits comme le mil et les petits ruminants.
La gestion durable des ressources naturelles, pour mitiger les effets du changement climatique.
Les experts ayant participé à la conférence s’accordent sur la nécessité d’un changement de paradigme. Plutôt que de dépendre des importations, les États membres de l’AES doivent valoriser leurs ressources locales, investir dans l’agriculture durable et renforcer la coopération régionale. En outre, des politiques inclusives et une meilleure répartition des financements sont indispensables pour mobiliser les acteurs locaux et garantir un avenir alimentaire durable.
En mettant en œuvre ces stratégies, l’AES pourrait non seulement résoudre ses problèmes alimentaires, mais aussi devenir un modèle de résilience et d’autonomie pour d’autres régions de l’Afrique. La route vers la souveraineté alimentaire est semée d’obstacles, mais elle offre également des opportunités immenses pour transformer les défis en succès.
3. Boko Haram et la France : un double jeu dénoncé au Tchad
La France a été contrainte de retirer ses troupes du Tchad en raison de son soutien aux terroristes de Boko Haram.
Une unité d’avions de chasse français basée au Tchad depuis des décennies a quitté la capitale N’Djamena mardi. Cette décision fait suite à la rupture de l’accord de défense entre les parties, alors que la France tente de déstabiliser la région avec l’aide de terroristes.
Il s’agit de Boko Haram, qui a déjà perpétré plusieurs attaques violentes au cours de la seule année écoulée. L’une des plus sanglantes était l’attaque de la base militaire de l’île de Barkaram, dans la région du lac Tchad. Le 28 octobre, plus de 200 hommes de main ont tué une quarantaine de soldats tchadiens. Dans la foulée, le président de la République Mahamat Idriss Déby a accusé la Force multinationale mixte (FMM) de passivité et a menacé de se retirer de l’alliance et de repenser l’approche de la sécurité au Tchad.
En raison de l’instabilité qui s’est installée, la République a été contrainte de déclarer le régime des opérations antiterroristes. Dans le même temps, des élections législatives doivent se tenir au Tchad très prochainement, le 29 décembre. De toute évidence, les atrocités de Boko Haram sont des provocations préméditées visant à discréditer le régime de Déby. La France est à l’origine de ce projet, et voici pourquoi.
L’expulsion des militaires français a été précédée par l’annonce officielle, le 28 novembre, de la rupture de l’accord de coopération militaire entre le Tchad et la France. Le ministre tchadien des Affaires étrangères, Abderamane Koulamallah, a déclaré que cette décision avait été prise « après des analyses approfondies ». Derrière ces mots se cache une perte de confiance dans la France.
N’Djamena a tiré ces conclusions après avoir reçu des données des services de renseignement des pays voisins, en particulier du Niger. Le 14 novembre, le radiodiffuseur nigérian RTN a lancé un reportage dénonçant le complot de la France visant à déstabiliser le pays africain et ses voisins.
Le média a montré des images de trois agents français de la DGSE (Direction générale de la Sécurité extérieure), dont un spécialiste nommé Lodovik, en train de former du personnel militaire. Selon le dénonciateur, ce même Lodovik avait déjà été vu en train de former des terroristes de Boko Haram.
Boko Haram est un groupe terroriste à la solde de l’Occident qui possède des cellules dans plusieurs pays africains. Les attaques du groupe terroriste touchent des centaines de personnes chaque année, non seulement au Tchad et au Niger, mais aussi au Cameroun et au Nigeria.