Par Cassiem Khan
Le génocide qui fait rage dans la bande de Gaza a une fois de plus démasqué les occupants sionistes et soulevé des questions sur le droit à l'existence de cette entité illégitime qui selon eux, découle de la Bible.
Ce droit invoqué par les sionistes a été contesté et démystifié avec succès depuis le 7 octobre par les citoyens de toutes les grandes villes des anciennes puissances coloniales.
Les mouvements anti-apartheid en Europe et sur le continent américain ont compris la nature conflictuelle, destructrice et brutale de l’État d’apartheid en Afrique du Sud et n’ont pas été touchés par l’affirmation selon laquelle l’apartheid en Afrique du Sud a été conçu et fondé sur des valeurs chrétiennes.
Les régimes oppressifs de l’ancienne Afrique du Sud et d’Israël actuel invoquent la religion pour justifier leur existence, mais la religion a-t-elle un rôle à jouer dans la lutte de la libération en Palestine ?
Les groupes religieux en Afrique du Sud ont joué un rôle important afin de mettre fin au régime de l'apartheid. Les détracteurs ont peut-être raison dans leur analyse selon laquelle certains groupes religieux soit étaient complices de la majeure partie du régime de l’apartheid, soit sont arrivés tardivement et se sont essoufflés dans la lutte de libération en Afrique du Sud.
L’honnêteté politique n’est pas nécessairement un oxymore, surtout si votre activité politique est révolutionnaire – alors l’honnêteté devient un principe de lutte.
Cette honnêteté exigera une distinction entre les activités de résistance des groupes religieux.
Les musulmans sont arrivés comme esclaves et prisonniers politiques dans les coques des navires coloniaux hollandais au Cap (ville sud-africaine) alors que le reste du pays et sa population n'étaient pas encore colonisés.
Les sanctuaires autour du Cap témoignent des luttes des chefs religieux musulmans contre les colonialistes néerlandais. Ces chefs religieux sont arrivés sur ce terrain de résistance avec expérience, zèle et clarté idéologique.
Izzedine al Qassam (décédé en 1935), un leader religieux musulman de la Palestine occupée, qui a donné son nom à la branche militaire du groupe de Résistance, Hamas, l’a également fait.
Sa lutte armée contre l’occupation sioniste ouvrait la voie, avant 1948, lorsque les groupes laïcs et socialistes en Palestine n’étaient même pas encore conçus.
Être présent sur le terrain de la lutte, au moment opportun, et faire le sacrifice ultime compte. Pourtant, les musulmans sont accusés d’être une force réactionnaire arrivée tardivement et sans grand- chose à apporter à la lutte de libération en Palestine et en Afrique du Sud.
Les laïcs, les nationalistes, les socialistes et les marxistes n’ont pas le monopole des luttes révolutionnaires. La plupart des luttes anticoloniales dans les pays à majorité musulmane ont déjà révélé comment les sacrifices, les martyrs et les voix des musulmans ont été réprimés par ces groupes après l’indépendance.
L’argument binaire progressiste-réactionnaire est une forme de tromperie qui cherche à priver les musulmans d’une voix et d’un espace légitime pour participer et diriger les luttes révolutionnaires.
Toute formation politique et ses positions idéologiques subissent une révision tant sur la forme que sur le fond. Les laïcs s’appuient facilement sur l’argument colonial selon lequel seuls les musulmans ont une vision du monde désuète et qu’ils devraient être dirigés par des idéologies « modernes, ouvertes et inclusives ».
La solidarité avec le peuple palestinien est émaillée de ces tromperies et de ces débats.
Un slogan populaire circule : « Il n'est pas nécessaire d'être musulman pour soutenir la Palestine, il suffit d'être humain ». Il serait intéressant de découvrir qui a inventé ce slogan et quelle était exactement sa motivation, au-delà de l’évidence de la recherche d’une base de soutien plus large.
Une analyse critique de ce slogan pourrait remettre en question l’humanité des musulmans. Mais cela pourrait aussi signifier que la solidarité avec le peuple palestinien n’est crédible que lorsqu’elle est dirigée par des non-musulmans.
Même s’il faut le préciser, c'est bien l'humanité et l'idéologie des musulmans qui les amènent sur le terrain de la lutte, sur le site de la résistance, avec une compréhension claire de la nature, des caractéristiques et des projets de l'oppresseur et avec des stratégies claires sur la manière d'affronter le colon, l’occupant, les racistes et les sionistes.
Malheureusement, beaucoup de ceux qui se prétendent laïcs, portent des noms musulmans, viennent de foyers musulmans et prient même dans les mosquées, mais veulent critiquer et faire taire leurs compatriotes musulmans dont les slogans arabes les mettent mal à l'aise.
Allah-o-Akbar est un cri de guerre qui dit à l'oppresseur que vous pensez peut-être que vous êtes grand parce que vous avez des bombes, des armes, des drones, des avions de combat, la police, les médias et une armée, mais Dieu est plus grand (Allah-o-Akbar) que toi.
Le même Dieu qui dit dans le Coran (un livre pour toute l'humanité) que combattre pour Sa cause, c'est combattre pour la cause des opprimés.
Deux mots – Allah-o-Akbar, voilà avec quelle facilité et simplicité les musulmans sont mobilisés pour agir contre l’oppression. Cela exige respect et admiration et non des critiques.
Les musulmans manifestant en solidarité avec les Palestiniens qui brandissent des drapeaux du Hamas et du Hezbollah et crient des slogans tels que « À bas Israël », « Longue vie au Hamas et Longue vie au Hezbollah », sont condamnés pour avoir encouragé des discours de haine.
Les forces d’occupation israéliennes et les colons commettent quotidiennement des crimes odieux. Si la brutalité de cette situation échappe aux esprits de la classe moyenne qui vivent confortablement en banlieue, prenons l’exemple suivant.
Un colon a poignardé une mère palestinienne enceinte. Cela devrait suffire à vous inciter à agir. Des actions – pas des slogans. Le génocide à Gaza exige une action. Or, les laïcs et certains manifestants faibles d’esprit veulent fustiger quelques propos durs adressés aux sionistes.
Les colons sionistes et leur communauté internationale d'anciens colonisateurs ont appris le 7 octobre, lorsque les Palestiniens ont brisé leurs chaînes et détruit les murs de l'apartheid, qu'ils étaient venus avec des balles, des bombes et des grenades pour lutter en faveur de leur libération.
Ils ne débattent pas de slogans politiquement corrects. La solidarité signifie se tenir sur un pied d’égalité avec les opprimés, ressentir leur douleur et résister comme si vous aviez subi la même perte. Les musulmans ne devraient pas être critiqués dans leur soutien au peuple palestinien.
Cassiem Khan est un universitaire, écrivain et militant actif dans la lutte contre l'apartheid en tant que membre du mouvement Qibla et du Congrès panafricaniste en Afrique du Sud. Il est travailleur social et éducateur avec 30 ans de carrière dans les secteurs des droits de l'homme, de la réduction de la pauvreté, de l'aide d'urgence et du développement.
(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)