Des violences ont éclaté entre manifestants et forces de l'ordre en marge du rassemblement organisé samedi à Paris pour rendre hommage aux trois Kurdes tués par un homme armé dans la capitale, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Au moins quatre voitures ont été renversées, dont au moins une incendiée, et des poubelles brûlées sur le boulevard du Temple, près de la place de la République. Les forces de l'ordre, visées par des jets de projectiles, ont répliqué par des tirs de grenades lacrymogènes.
Plusieurs centaines de personnes se sont réunies samedi à la mi-journée place de la République à Paris. Dans la foule, de nombreux manifestants agitaient des drapeaux du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) ou à l'effigie de trois militantes kurdes assassinées en janvier 2013 à Paris, a constaté une journaliste de l'AFP. Une minute de silence a été observée, en musique, à la mémoire des victimes et de « tous les Kurdes morts pour la liberté ». Plusieurs manifestants présents samedi ont dénoncé auprès de l'AFP une « injustice » et un acte « terroriste » et « politique ».
Peu avant midi, un homme a ouvert le feu près du centre culturel kurde Ahmet-Kaya situé au 16 de la rue d’Enghien, dans un quartier animé du Xe arrondissement de Paris, prisé des communautés turques et kurdes. Une femme et deux hommes sont morts. Selon le dernier bilan, un homme est toujours sérieusement blessé, deux autres le sont aussi mais moins grièvement. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est rendu sur place dans l’après-midi. Il a précisé que deux des victimes ont été tuées devant le centre culturel kurde. Le troisième a été tué dans un restaurant kurde proche où il tentait de se dissimuler après avoir été poursuivi par l’assaillant présumé.
Légèrement blessé au visage, ce dernier a été interpellé après avoir été maîtrisé par plusieurs personnes dans un salon de coiffure à proximité. Une «mallette» contenant «deux ou trois chargeurs approvisionnés, une boîte de cartouches calibre 45 avec au moins 25 cartouches à l’intérieur», a été découverte près de lui selon une source proche du dossier. L’arme utilisée est un «Colt 45 de 1911» de l’armée américaine «d’apparence usée». Il a été, depuis, placé en garde à vue. L’enquête ouverte pour «assassinat», «tentative d’assassinat», «violences volontaires avec armes» et «infraction à la législation sur les armes» a été confiée à la Direction régionale de la police judiciaire (DRPJ), a indiqué la procureure de Paris, Laure Beccuau, venue sur place peu après les faits.
Le tireur présumé, W. M., 69 ans, a revendiqué le caractère «raciste» de son geste dès son interpellation, selon des sources policières. Conducteur de train retraité, de nationalité française, il est connu de la justice pour trois affaires. En 2017, le tribunal judiciaire de Bobigny le condamne une première fois à six mois de prison avec sursis et à une interdiction de détenir une arme pendant cinq ans pour des faits de détention d’armes prohibées. Il est à nouveau condamné le 30 juin 2022 à douze mois de prison pour des faits de violences avec arme commis en 2016, condamnation dont il a fait appel, selon le communiqué du parquet.
Enfin, il est mis en examen depuis décembre 2021 pour violences avec armes, avec préméditation et à caractère racistes et dégradation, pour des faits commis le 8 décembre 2021 : il est soupçonné d’avoir blessé à l’arme blanche des migrants d’un campement du XIIe arrondissement de Paris et d’avoir lacéré leurs tentes, avait relaté à l’époque une source policière.
Le parquet a annoncé samedi midi la prolongation de la garde à vue du suspect. Le mobile raciste est retenu par l’enquête. Le suspect a voulu «manifestement s’en prendre à des étrangers», a affirmé la veille Gérald Darmanin, précisant qu’«il n’est pas sûr que le tueur qui a voulu assassiner ces personnes […] l’ait fait spécifiquement pour les Kurdes».