Des sources égyptiennes rapportent que de nombreux contacts ont été établis entre la présidence et le renseignement égyptiens d’une part, et les dirigeants saoudiens et émiratis de l'autre, au sujet de la Libye.
L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont encouragé l’action militaire et des ambitions économiques du Caire par rapport à la Libye, et se sont dit favorables à une intervention militaire égyptienne pour mettre fin au conflit entre le gouvernement de l’union national et les forces du général Khalifa Haftar.
Ces sources ajoutent que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a reçu des comptes rendus de l’armée, du renseignement militaire et de son ministère des Affaires étrangères qui ont évalué la question d’une intervention militaire égyptienne en Libye. Certaines de ces analyses mettent en garde contre les conséquences d’une telle action qu’elles ont qualifiée de « bourbier » ou de « piège », d’autant plus qu’à l’heure actuelle la question éthiopienne et le problème du barrage de la Renaissance (sur le Nil bleu) constituent les priorités stratégiques de l’Égypte.
Les auteurs de l’une de ces analyses proposent au président Sissi de mettre ses forces armées, surtout la marine et l’armée de l’air, en état d’alerte mais de n’intervenir que de manière limitée mais forte contre quelques positions des forces turques et du gouvernement de l’Union nationale, à la seule condition que la situation se complique dans les deux zones libyennes d’al-Djoufrah et de Syrte. Ils demandent à Sissi d’éviter une intervention terrestre directe en Libye.
Selon les observateurs, l’un des objectifs d’une telle action militaire serait d’envoyer un message très fort au gouvernement éthiopien en ce qui concerne les litiges du Nil bleu.
Selon un autre scénario, l’Égypte pourrait se contenter de constituer une base militaire dans l’est de la Libye pour s’assurer d’un bon contrôle de la situation sur le terrain. Dans ce cadre, l’armée égyptienne pourrait profiter de cette base militaire pour former une « armée tribale » favorable aux intérêts du Caire. Les forces du général Khalifa Haftar pourraient être le noyau principal de cette armée dont l’existence permettrait à Sissi de limiter le niveau d’engagement de l’armée égyptienne en Libye.
En ce qui concerne la position des Émirats arabes unis, des sources diplomatiques égyptienne estiment que suite aux défaites successives de Haftar sur le terrain, les Émiratis préfèrent que l’Égypte prenne l’initiative dans les régions orientales de la Libye. Mais il existe aussi des divergences entre Le Caire et Abou Dhabi: Sissi souhaite donner une nouvelle chance à Khalifa Haftar pour reprendre en main la situation, tandis que le prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammed ben Zayed, estime, selon certaines sources, que Haftar a gaspillé toutes les aides qu’ils a reçues de la part des Émiratis. D’autant plus qu’Abou Dhabi semble préférer le président de la Chambre des représentants à Tobrouk, Aguila Salah Issa, à Khalifa Haftar.
Pourtant au Caire, les observateurs croient que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis n’ont plus aucune confiance aux personnalités politiques libyennes et craignent qu’elles finissent par commettre les mêmes erreurs que Khalifa Haftar.
En tout état de cause, des sources diplomatiques égyptiennes croient qu’il est peu probable que Le Caire réalise dans un proche avenir son projet d’intervention militaire en Libye, car Sissi ne veut pas entrer en guerre, pour une durée relativement longue, contre la Turquie et le gouvernement de l’union nationale à Tripoli, reconnu par la communauté internationale, d’autant plus qu'Ankara et Tripoli envoient des signaux pour montrer qu’il seraient prêts à négocier avec le Caire au sujet de l’élimination de Haftar de la scène politique du pays.