Les Kurdes syriens, qui ont évité pendant les sept années de la crise syrienne d’entrer en conflit direct avec l’armée gouvernementale syrienne, ont maintenant compris que Damas pouvait les aider à faire face à l’intervention militaire de la Turquie dans les zones qu’ils contrôlent.
Le célèbre éditorialiste du monde arabe Abdel Bari Atwan s’est attardé sur les dernières évolutions en Syrie, notamment le récent accord entre les Kurdes et Damas. « Les Kurdes syriens, en adoptant une approche raisonnable, se sont distingués des Kurdes irakiens et ont ainsi évité un conflit militaire avec l’armée syrienne qui aurait été coûteux », a-t-il écrit dans un article dans le journal Raï al-Youm.
Une délégation des Kurdes syriens à Damas a annoncé avoir conclu un accord avec le gouvernement syrien pour mener des négociations visant à mettre fin à la violence en Syrie.
L’annonce a été faite après que le soi-disant Conseil démocratique syrien (CDS), l’aile politique des Forces démocratiques syriennes, a envoyé une délégation à Damas pour des entretiens avec des responsables syriens plus tôt cette semaine.
Le mercredi 18 juillet, Ilham Ahmed a annoncé que le Conseil démocratique syrien entendait ouvrir des bureaux à Damas, Lattaquié, Homs et Hama dans le cadre de la mise en place d’une « solution démocratique à la crise » en Syrie.
Riad Darar, coprésident du Conseil démocratique syrien, a réaffirmé, de son côté, que son camp pouvait s’entretenir avec le gouvernement Damas sans recourir au langage de la menace afin d’atteindre des résultats allant dans l’intérêt de la Syrie.
Le CDS a indiqué samedi dans un communiqué qu’il avait convenu avec le gouvernement du président syrien Bachar al-Assad de former des comités qui « traceraient une feuille de route vers une Syrie démocratique et décentralisée ».
La délégation du CDS s’est rendue à Damas pour la première fois après que le président Assad a déclaré qu’il « ouvrait la porte » à des négociations avec les Kurdes syriens qui, selon lui, « semblaient se méfier » de leur allié imprévisible — les États-Unis.
Selon Atwan, les Kurdes syriens, qui bénéficient du soutien américain, ont pris cette mesure pour plusieurs raisons :
Premièrement, la méfiance envers les Américains, qui a augmenté après que les États-Unis ont abandonné à leur sort les groupes armés dans le sud de la Syrie et ont cessé de les soutenir face aux opérations de l’armée syrienne à Deraa et à Quneitra. Les Américains ont également conclu un accord avec la Turquie contre leurs frères kurdes à Manbij et à Afrin, laissant à leur sort les Kurdes irakiens.
Deuxièmement, la mise en garde de Damas : le président syrien Bachar al-Assad avait déjà déclaré que les FDS devraient s’asseoir à la table du dialogue avant que l’armée syrienne ne soit obligée de recourir à une option militaire. Il semble que les FDS aient choisi la première option.
Les Kurdes syriens ont évité pendant les sept années de la crise syrienne d’entrer en conflit avec l’armée gouvernementale syrienne. Ils ont maintenant compris que Damas pouvait les aider à faire face à l’intervention militaire de la Turquie dans les zones contrôlées par les Kurdes.
Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al-Mouallem, a été l’une des premières personnes à proposer aux Kurdes une offre de Damas pour négocier une certaine autonomie dans leur région.
Walid al-Moualem a déclaré en septembre 2017 que le gouvernement pourrait discuter de la revendication kurde une fois que Daech sera vaincu, a rapporté l’agence de presse officielle syrienne SANA.
Le gouvernement syrien considère que les Kurdes sont, à part entière, une composante politique de la nation syrienne. Damas a même envoyé des renforts dans les régions kurdes au moment où la Turquie a tenté d’occuper les villes syriennes contrôlées par les Kurdes.
Il est cependant trop tôt pour discuter des résultats de ces pourparlers, d’autant plus que ces derniers sont véritablement sans précédent. Les négociations en cours entre les Kurdes et le gouvernement syrien sont le reflet du pragmatisme et du réalisme des deux parties, qui ont pour objectif prioritaire d’éviter un conflit sanglant.
Les États-Unis et le gouvernement israélien en particulier, et l’Occident en général, ont trompé les Kurdes et les ont utilisés pour atteindre leurs propres objectifs. L’exemple le plus frappant dans à ce sujet est le Kurdistan irakien. « Il est maintenant temps que les Kurdes syriens tirent profit de ces leçons pour renforcer la solidarité arabo-kurde qui sert les intérêts de la Syrie », a conclu l’éminent journaliste du monde arabe.