Les appels internationaux à la retenue n’y auront rien fait, l’offensive de l’armée turque contre les miliciens des YPG dans le nord de la Syrie, qui entre dans sa deuxième semaine, risque de s’intensifier sous la pression du président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a promis d’élargir l’offensive.
Dans un discours télévisé le 26 janvier, le président turc a évoqué la possibilité d’une extension de l’offensive lancée par l’armée turque en Syrie contre la ville d’Afrin, tenue par les Kurdes. Assurant vouloir éliminer toute présence des miliciens kurdes, le chef d’État turc a promis de « nettoyer » la ville de Manbij, située à une centaine de kilomètres à l’est d’Afrin.
Le président turc a par ailleurs laissé entendre que l’offensive pourrait se poursuivre au-delà de la ville de Manbij, affirmant qu’il ne voulait laisser « aucun terroriste jusqu’à la frontière irakienne ».
Ankara a lancé le 20 janvier l’opération « Rameau d’olivier » dans le nord de la Syrie pour combattre les YPG, qu’il accuse d’être la branche syrienne du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan).
Évoquée depuis plusieurs mois, l’intervention turque à Afrin a été précipitée par l’annonce de la création prochaine, par la coalition prétendument anti-Daech emmenée par Washington, d’une « force frontalière » incluant notamment des YPG.
La tournure que prennent les événements à Afrin semble confirmer l’hypothèse de certains analystes selon lesquels la Turquie vient paradoxalement au secours des États-Unis.
Contrairement aux déclarations des uns et des autres, les Américains ne cherchent vraisemblablement pas à créer un État souverain et indépendant dans le nord de la Syrie, mais plutôt un simili-État, non reconnu comme l’est par exemple le Puntland somalien ou le Kurdistan irakien. Pour les Américains, l’essentiel consiste à pouvoir créer une zone tampon dans le Nord, pour pouvoir y construire une base militaire permanente, et Manbij est le meilleur candidat pour cette mission : la concentration de troupes US, la proximité avec le sud de la Turquie et, partant, avec la base d’Incirlik en font un choix idéal. Et M. Erdogan aurait décidé encore une fois de leur servir de catalyseur.
Fabrice Beaur, expert pour l’ONG EODE, et Bassam Tahhan, analyste franco-syrien des questions internationales nous donnent plus de précisions à ce sujet.