Le journal français Le Figaro a interviewé le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale de la République islamique d’Iran, Ali Shamkhani.
Pour Ali Shamkhani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale de la République islamique d’Iran, l’élection d’Emmanuel Macron est l’occasion de développer les relations franco-iraniennes dans les domaines économiques et sécuritaires. Son interview a été réalisée avant les attaques terroristes de mercredi 7 juin contre le Parlement iranien et le mausolée de l’Imam Khomeini.
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Le Figaro : Comment répondre à Donald Trump qui veut rogner les ailes de l’Iran en Syrie, en Irak et au Yémen ?
Ali Shamkhani : Cet objectif n’est pas nouveau. Les États-Unis l’affichent depuis des années. C’est bien la preuve qu’ils ont échoué. Mais l’Iran ne cherche la tension avec aucun pays, à part le régime sioniste. L’Iran veut avoir de bonnes relations avec toutes les nations qui respectent les lois de la diplomatie.
– Pour la première fois, l’aviation américaine a bombardé en Syrie un convoi d’une milice pro-iranienne. Une ligne rouge a-t-elle été franchie ?
Ali Shamkhani : Les Américains n’ont pas attaqué des Iraniens, mais l’armée syrienne, et c’était la deuxième fois, et cela a favorisé Daech. Les États-Unis utilisent des groupes terroristes pour promouvoir leurs objectifs stratégiques. Mais ce dernier bombardement était plus de la propagande qu’une véritable attaque. En outre, ce ne sont pas les Américains qui déterminent nos lignes rouges.
– En Irak, quel est l’avenir des relations entre les Américains et les milices chiites qui vous sont proches ?
Ali Shamkhani : Je ne vois pas d’avenir à la collaboration entre Américains et Iraniens en Irak. Ces milices ont été créées en 2014, après l’arrivée de Daech. Elles sont sous le contrôle du commandant en chef de l’armée, le Premier ministre. Le Parlement a reconnu leur présence, elles vont continuer d’opérer, car ceux qui fabriquent les terroristes restent actifs.
– Daech est-il une menace pour l’Iran ?
Ali Shamkhani : Daech est un instrument utilisé par certains pays de la région pour en menacer d’autres. La pensée takfiriste qui alimente Daech a des usines de production en Arabie saoudite. La pensée wahhabite, l’argent et les laissés-pour-compte forment la ligne de production terroriste saoudienne. Et quand je dis argent, je veux dire de l’argent donné aux terroristes par des individus en Arabie, mais aussi de l’argent venu de l’État. Même si le combat contre Daech nous a coûté très cher en termes financiers et humains, l’Iran poursuivra cette guerre.
– L’Arabie joue-t-elle un rôle dans les troubles qui agitent vos minorités ? Y a-t-il un risque de guerre avec Riyad ?
Ali Shamkhani : Le vice-prince héritier, Mohammed ben Salmane a déclaré que l’Arabie allait déplacer la guerre en Iran, et quelques jours après, des soldats iraniens ont été enlevés, et d’autres tués près de la frontière pakistanaise, alors qu’un incident éclatait à Ahvaz. Nous avons arrêté des gens ayant perpétré des opérations à Ahvaz : ils ont avoué avoir été payés par l’Arabie. Nous discutons avec les services pakistanais pour que les Saoudiens stoppent ces interférences. Le Pakistan est prêt à nous aider. Notre différend avec l’Arabie peut être réglé. Mais certains de leurs dirigeants sont jeunes, ils manquent de sagesse. Mohammed ben Salmane est une bulle, si on la pique avec une aiguille, la bulle explosera.
– Quel message adressez-vous à Emmanuel Macron ?
Ali Shamkhani : Son élection est une bonne occasion de développer nos relations dans les domaines économiques et sécuritaires, car la France est ; elle aussi, menacée par les terroristes. L’Iran souhaite renforcer ses relations sécuritaires ainsi que l’échange de renseignements avec la France. De son côté, l’ambassadeur de France en Iran est un dignitaire de votre appareil sécuritaire. Les organisations terroristes actives dans la région ont été soutenues par des pays alliés de la France, l’aide de la France peut nous être très utile.
Source : Le Figaro