Alors que l’émissaire spécial du président Rohani Abbas Araqtchi se trouve à Paris pour répondre à l’offre de médiation française dans le cadre d’une trêve USA/Iran, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian se montre menaçant.
Lors d’une rencontre avec les députés français, il a laissé entendre que la France pourrait coopérer avec l’idée d’une patrouille maritime occidentale censée « assurer la sécurité maritime dans le golfe Persique ».
Sans évoquer le fait que la Grande-Bretagne est en partie à l’origine des nouvelles tensions avec l’Iran, Le Drian a affirmé que « son pays coopérerait avec d’autres pays européens pour une amélioration de la sécurité de la navigation dans le golfe Persique ». La France est-elle en train de menacer l’Iran ?
Et pourtant lors d’une rencontre avec l’intéressé, le vice-ministre iranien des Affaires étrangères a affirmé que l'Iran fera tout son possible pour assurer la sécurité de la région, en particulier celle du détroit d'Hormuz.
Le diplomate iranien a rappelé que l’Iran a toujours eu la responsabilité de garantir le transit libre de l’énergie via le détroit d’Hormuz et que Téhéran ne permet aucune perturbation de la navigation dans cette zone sensible.
Araqtchi a également indiqué ce qu’attendait l’Iran de la France qui se pose maintenant en médiatrice d’une crise qui risque de déboucher sur une guerre dévastatrice pour la région et pour le monde.
« L’on s’attend à ce que l’Europe, notamment la France, adopte une position claire contre la politique américaine consistant à réduire à zéro les exportations du pétrole iranien », a-t-il affirmé, en allusion au retrait unilatéral des États-Unis de l’accord de Vienne et des mesures illégales imposées par l’administration Trump à Téhéran avec en toile de fond la volonté malsaine de priver l’Iran de ses recettes énergétiques.
Brossant un tableau clair du processus de la réduction des engagements de Téhéran au titre du PGAC (Plan global d’action conjoint), le diplomate iranien a déclaré que « l’Iran a mis à son ordre du jour cette question, sur la base de ses droits prévus dans l’accord de Vienne », sans manquer de préciser que « les voies diplomatiques restent toujours ouvertes ».
Remerciant les efforts et initiatives de la France et de la personne même d’Emmanuel Macron, M. Araqtchi a rapporté à M. Le Drian qu’il est chargé aussi de transmettre le message du président iranien à son homologue français ; une rencontre étant prévue à cet égard. Cependant, il se dit que M. Le Drian s’est montré peu compréhensif lors de son entretien avec M. Araqtchi et ce en dépit de la bonne volonté affichée par ce dernier.
Plus tard lors de sa rencontre avec les députés français, Le Drian a appelé une fois de plus l’Iran à cesser la réduction de ses engagements pris dans le cadre du PGAC et à « revenir dans l’accord nucléaire » et ce, sans dénoncer les agissements destructeurs des États-Unis qui ne font que reléguer au second plan la diplomatie en faveur des solutions extrêmes.
Comme l’a affirmé M. Araqtchi, « l’Iran est lui-même un grand producteur et exportateur du pétrole », à qui il importe plus que quiconque, la sécurité maritime dans le golfe Persique.
Depuis l’interception et la détention illégale du pétrolier « Grace 1 » à Gibraltar, la France s’est contentée de lancer des appels à la désescalade, sans pour autant aller jusqu’à condamner la démarche britannique. Et pourtant, Paris reproche à Londres sa politique européenne et sa tendance à faire passer les intérêts américains avant ceux de l’Europe. Car l'idée d'une "patrouille maritime européenne" demande à ce qu'au préalable Londres fasse entièrement partie du jeu européen, ce qui est loin d'être le cas.
L’idée de la création d’une coalition militaire maritime dans le golfe Persique, telle quelle a été mise en avant par Londres est considérée par Téhéran comme une "déclaration de guerre" dans la mesure où elle renie à l'Iran son droit historique de garantir la sécurité de ses eaux territoriales, le détroit d'Homuz étant une voie maritime partagé entre l'Iran et Oman. Reste à savoir jusqu'où ira la France dans son idée d'un engagement militaire dans le camp anglosaxone.
Mardi, alors que le haut diplomate iranien se trouvait à Paris, Le Drian a cultivé l’ambiguïté tout comme son homologue britannique : « l'initiative maritime européenne ne ferait pas partie de la politique des États-Unis de pression maximum sur l’Iran parce que nous restons déterminés à préserver l’accord nucléaire iranien.... mais elle vise à garantir la liberté de navigation dans le Golfe (Persique). »
Le Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) a intercepté vendredi le pétrolier britannique Stena Impero lors de son passage du détroit d’Hormuz ; l’engin ayant enfreint les lois internationales maritimes. Le pétrolier britannique est entré dans le détroit d'Hormuz par une autre voie que la voie habituelle et il n’a pas répondu aux messages d'avertissement lancés par les équipes iraniennes. Sa saisie a évité une catastrophe environnementale.