Le rédacteur en chef du quotidien Rai al-Youm a prévu la formation d’une alliance russo-syrienne qui allait repousser toute attaque des États-Unis contre la Syrie.
Le rédacteur en chef du quotidien Rai al-Youm, Abdel Bari Atwan, a rédigé, ce mardi 10 avril, un article au sujet d’une attaque aérienne d’Israël contre la base militaire T4 en Syrie et des tensions accrues entre la Russie et les États-Unis.
« Une ambiance de conflit règne au Moyen-Orient sur fond des menaces de Washington d’attaquer la Syrie et ses alliés. Le président américain Donald Trump a accusé son homologue russe Vladimir Poutine d’être derrière la prétendue attaque chimique dans la Ghouta orientale. Cette accusation renforce l’éventualité d’une offensive américaine contre les bases et les forces appartenant à la Russie en Syrie. Personne ne pourra prévoir quelle sera la prochaine cible des États-Unis en Syrie, mais la rhétorique virulente de Donald Trump laisse présager que le président américain ne se contentera pas d’une base militaire ou d’un aéroport de la Syrie. Il pourrait aller plus loin en prenant pour cible des installations militaires conjointes appartenant à la Russie et à la Syrie dans la ville de Damas, mais une telle mesure risquerait d’être suivie d’une riposte cinglante de Moscou.
Il existe trois arguments qui laissent prévoir la formation d’un camp russo-syrien pour contrecarrer l’agression franco-américaine.
Primo, les systèmes de défense antiaérienne de la Syrie ont réussi à abattre cinq missiles, sur l’ensemble de huit missiles tirés par les avions de combat israéliens en direction de la base militaire T4. Cela signifie que l’armée syrienne a reçu des missiles antiaériens bien performants de son allié russe.
Secundo, Iouri Chvytkine, vice-président de la commission de la défense de la Douma, a réservé au gouvernement syrien le droit d’attaquer les bases israéliennes d’où avaient décollé les avions ayant tiré des missiles sur la base T4. Iouri Chvytkine a également ajouté que l’armée syrienne avait le droit d’attaquer les bases militaires étrangères à l’intérieur de la Syrie. Cette phrase du responsable russe fait implicitement allusion aux bases militaires américaines dans la région d’al-Tanf, à la frontière Irak-Jordanie, ainsi que dans des régions comme Kobané, Qamichli, Raqqa et Manbij.
Tertio, le fait que les missiles ayant frappé la base T4 aient été tirés par des F-15 israéliens qui survolaient le territoire libanais montre que les commandants de l’armée israélienne savent bel et bien que leurs appareils seraient très probablement abattus dès leur entrée dans l’espace aérien de la Syrie. Cela signifie que Moscou avait déjà donné son feu vert à Damas pour qu’il utilise, si nécessaire, les S-300 et S-400 russes, acquis par la Syrie, pour intercepter tout appareil israélien violant l’espace aérien de la Syrie.
En réalité, Donald Trump se sent humilié par l’échec de son plan en Syrie et par la victoire de l’adversaire russe. Il entend redorer son blason par une offensive militaire qui pourrait en même temps être suivie d’une confrontation illimitée avec Moscou.
Lorsque Donald Trump accuse Vladimir Poutine d’être derrière la prétendue attaque chimique dans la Ghouta orientale et qu’il le menace de payer un prix élevé pour cette attaque, cela constitue une “déclaration de guerre”. Connu pour sa capacité à prendre des décisions difficiles, le président russe, qui est en même temps résolu à faire respecter le prestige de son pays, ne restera pas les bras croisés devant les récentes évolutions.
Il est probable que le président américain veuille inciter la Syrie et la Russie à réagir à l’attaque au missile de l’armée israélienne, qu’il avait lui-même préparée, pour pouvoir se lancer dans une intervention militaire, sous prétexte de soutenir son allié israélien. Cependant, la retenue dont ont fait preuve la Syrie et la Russie face à cette agression israélienne a fait capoter les plans de Donald Trump et l’a poussé à avoir recours à une rhétorique encore plus menaçante.
Nous vivons 48 heures très délicates qui pourraient accoucher de n’importe quel incident, mais il est certain que si le régime israélien venait à attaquer la Syrie le premier, les États-Unis et leurs alliés paieraient aussi un lourd tribut. »