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Zoom Afrique du 5 décembre 2024

Zoom Afrique du 5 décembre 2024

Les titres de la rédaction :

  • Namibie : une politique sur le contenu local pour porter l’exploitation du brut
  • A Lomé, l’Afrique de l’Ouest cherche à combler son déficit énergétique
  • Burkina Faso : « contribution directe » de 171 millions $ de la mine d’or Bomboré en 2023
  • La construction des 63,5 km de voie ferrée entre Tiaret et Tissemsilt a démarré en Algérie

Les analyses de la rédaction :

1. Une victoire pour la dignité des Congolais métis et un coup de projecteur sur les crimes coloniaux belges 

La condamnation historique de l’État belge pour "crimes contre l’humanité" dans l’affaire des enfants métis du Congo marque une étape cruciale dans la reconnaissance des atrocités commises sous l’ombre du colonialisme. Ce verdict, rendu par la cour d’appel de Bruxelles, résonne bien au-delà des murs du tribunal, portant une voix nouvelle pour les victimes de ce passé douloureux, longtemps occulté par les puissances coloniales. 

Les faits : une séparation orchestrée et un arrachement aux racines africaines 

Entre 1946 et 1950, des milliers d’enfants métis, nés d’unions entre colons belges et femmes congolaises, furent arrachés à leurs mères. Placés de force dans des orphelinats ou des institutions religieuses, ces enfants étaient systématiquement éloignés de leur héritage africain. Cette pratique raciste, méthodiquement organisée par l’administration coloniale belge, visait à les "blanchir" culturellement, tout en occultant leur paternité belge. Ces actes ont détruit des vies, créant des générations d’hommes et de femmes aux identités fracturées. 

Pour les plaignantes, cinq femmes courageuses aujourd’hui âgées entre 73 et 78 ans, ce jugement est un triomphe tardif, mais nécessaire. Comme elles l’ont témoigné, ce transfert avait pour but de "nous couper de nos racines africaines tout en nous laissant dans l’ignorance de l’identité de notre père, belge". Ces paroles poignantes révèlent les dégâts psychologiques et culturels infligés par une politique coloniale déshumanisante. 

Pour la première fois en Europe, un État est reconnu coupable de crimes contre l’humanité liés à sa politique coloniale. Cela ne se limite pas à un acte juridique ; c’est un véritable appel à la conscience collective. L’avocat des plaignantes, Me Angelet, a salué cette décision comme "une victoire de l’État de droit", ajoutant que "la Belgique accepte enfin de regarder en face son passé colonial". Ce moment est en effet historique, mais il doit aussi servir de catalyseur pour d’autres nations européennes ayant des passés similaires à assumer. 

Si cette condamnation est un tournant, elle ne saurait effacer des décennies de souffrances. L’État belge doit aller au-delà des mots et des jugements pour restaurer la dignité des victimes et de leurs descendants. Des réparations matérielles et symboliques, telles que des indemnisations, des excuses officielles, et des actions éducatives sur l’histoire coloniale, doivent être envisagées. 

Ce verdict souligne également la nécessité pour l’Afrique de prendre conscience de son histoire et de revendiquer pleinement sa souveraineté culturelle et mémorielle. Les pays du continent, en particulier le Congo, doivent exiger de la Belgique et d’autres anciennes puissances coloniales une reconnaissance complète de leurs crimes et une réhabilitation des mémoires brisées. 

Cette victoire judiciaire des métis congolais est une leçon de résilience, mais aussi un rappel de l’impératif pour l’Afrique de définir elle-même son futur. Le colonialisme a cherché à fragmenter nos identités, mais chaque acte de justice, aussi tardif soit-il, est une pierre dans l’édifice d’une Afrique unie, consciente de son héritage et prête à bâtir un avenir souverain. 

Il est temps pour l’Afrique de réclamer non seulement la vérité, mais aussi des actions concrètes pour réparer les torts du passé. Que cette décision inspire une nouvelle génération à exiger justice et dignité pour tous les enfants du continent. 

2. Le Niger brise les chaînes de l'exploitation d'Orano 

Dans un contexte marqué par des rapports de force asymétriques entre le Niger et les multinationales étrangères, le gouvernement de transition nigérien vient de poser un acte fort en prenant le contrôle opérationnel de Somaïr, une filiale stratégique du géant français du nucléaire Orano. Ce geste, qui s'inscrit dans une logique de souveraineté économique, marque une étape décisive dans la quête d'une gestion équitable des ressources naturelles du pays. 

Depuis des décennies, le Niger, riche en ressources naturelles, notamment en uranium, a vu une grande partie de ses richesses exploitées par des acteurs étrangers au détriment de ses populations locales. La décision de s'opposer à Orano s'inscrit dans une volonté affirmée de rééquilibrer ces relations inéquitables. Le communiqué d'Orano évoque des "ingérences" et un "refus d'exporter les produits", mais pour le gouvernement nigérien, il s'agit d'une réponse légitime aux pratiques opaques et désavantageuses imposées par la société française. 

En 2022, le Niger représentait environ 4 % de la production mondiale d’uranium, une ressource essentielle pour les réacteurs nucléaires français qui génèrent 65 % de l’électricité du pays. Pourtant, les bénéfices pour le Niger restent dérisoires, alimentant une frustration légitime parmi ses citoyens. Le refus d’exportation par les autorités nigériennes est une déclaration forte : les ressources du pays doivent avant tout bénéficier à son peuple. 

Le Niger n’agit pas seulement pour lui-même. Cette prise de contrôle est un signal fort pour d'autres nations africaines riches en ressources naturelles, souvent exploitées dans des cadres économiques néocoloniaux. La démarche du Niger pourrait inspirer des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), qui cherche à défendre les intérêts africains face aux ingérences occidentales. 

En mettant en avant ses droits souverains, le Niger illustre une aspiration africaine croissante : ne plus se contenter du rôle de pourvoyeur de matières premières bon marché, mais s’affirmer comme un acteur incontournable dans la chaîne de valeur mondiale. 

Orano, tout en contestant les actions du gouvernement nigérien, ne peut ignorer les critiques sur son impact social et environnemental. Les mines d’uranium, si elles génèrent des profits colossaux, laissent derrière elles des problèmes environnementaux majeurs et des communautés locales marginalisées. Par sa décision, le Niger démontre que les enjeux de développement durable et de justice sociale ne peuvent être dissociés de l’exploitation des ressources naturelles. 

Face aux pressions internationales et aux menaces juridiques brandies par Orano, le Niger aura besoin du soutien de ses partenaires africains et de la communauté internationale qui défend une gestion juste et équitable des ressources mondiales. Ce bras de fer incarne un combat plus large pour une Afrique maîtresse de son destin. 

En reprenant le contrôle de Somaïr, le Niger montre la voie d'une souveraineté économique et politique audacieuse. Cet acte pourrait bien marquer le début d’une nouvelle ère, où les nations africaines revendiquent, haut et fort, leur droit de profiter pleinement de leurs propres richesses. 

3. La RDC: un combat pour la justice face au silence international 

La République Démocratique du Congo (RDC) vient d'accomplir une avancée majeure dans sa quête de justice internationale en obtenant l'ouverture d'un procès contre le Rwanda devant la Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (CADHP). Cette étape cruciale s’inscrit dans une série d’actions juridiques entreprises par Kinshasa, notamment devant la Cour de Justice de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et la Cour Pénale Internationale (CPI). 

L’annonce de l’audience publique, fixée au 12 février 2025 à Arusha, en Tanzanie, marque un tournant significatif. Selon le Vice-Ministre de la Justice de la RDC, Me Samuel Mbemba Kabuya, la démarche vise à obtenir reconnaissance et réparation pour les violations présumées des droits humains perpétrées par le Rwanda dans l’Est de la RDC. 

Depuis des décennies, l’Est de la RDC est le théâtre d’atrocités commises par divers groupes armés, certains soutenus ou tolérés par des puissances régionales. Malgré des rapports accablants d’organisations internationales et des appels répétés de la société civile congolaise, la communauté internationale reste largement silencieuse. Ce mutisme contraste fortement avec l'ampleur des massacres, des déplacements forcés, et des violences sexuelles qui dévastent des millions de vies. 

Alors que la RDC cherche à utiliser les mécanismes juridiques disponibles pour attirer l'attention sur ces crimes, l'inaction des grandes puissances soulève des interrogations. Pourquoi les sanctions et pressions internationales, si promptes dans d’autres contextes, tardent-elles face à une crise si manifeste ? Le soutien supposé de certains pays aux auteurs des violences alimente des soupçons de complicité tacite. 

Malgré les défis colossaux, le gouvernement congolais multiplie les efforts pour obtenir justice. L’ouverture du procès devant la CADHP reflète la détermination de la RDC à confronter une réalité souvent ignorée : les ingérences extérieures et les violations continues de sa souveraineté. 

Cette démarche symbolise aussi un message fort à l’Afrique. Il est temps que le continent cesse d’être un spectateur passif de ses propres drames. La RDC, en portant l’affaire devant des instances africaines, montre l’exemple d’un État qui refuse de laisser son destin dicté par des intérêts étrangers ou des compromis politiques. 

L’avenir de la RDC, et de l’Afrique en général, dépend de la capacité des peuples et des États à s’unir contre l’impunité. Ce procès ne concerne pas seulement la RDC ou le Rwanda, mais la dignité humaine et la souveraineté des nations africaines. 

La communauté internationale a une responsabilité morale et politique de soutenir ces initiatives. Faillir à cette responsabilité équivaut à cautionner l'injustice. L’Afrique, elle, doit jouer un rôle central dans la résolution de ses crises, en consolidant des mécanismes comme la CADHP et en promouvant une justice équitable et impartiale. 

L’audience de février 2025 sera un test pour les institutions africaines et internationales. Pour la RDC, c’est une occasion de rappeler au monde que son peuple, victime de l’avidité et de la violence, mérite enfin d’être entendu et soutenu. 

Le silence ne peut plus être une option. Il est temps pour les leaders africains et mondiaux d’agir en faveur de la paix et de la justice, pour mettre fin à une tragédie qui a trop duré. La RDC, en se tenant debout, montre qu’un futur de dignité et de respect est possible, à condition que l’humanité ait le courage de le défendre. 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV