« Les politiques de l’Arabie saoudite, notamment vis-à-vis du Yémen, ainsi que son suivisme aveugle aux États-Unis sont à l’origine de la formation des alliances, tout comme ce qui s’est passé lors du sommet musulman à Kuala Lumpur », estime Abdel Bari Atwan.
Le célèbre analyste du monde arabe et rédacteur en chef du quotidien Rai al-Youm a réaffirmé que le sommet islamique de Malaisie pourrait remplacer l’Organisation de coopération islamique (OCI) et détrôner l’Arabie saoudite de sa prétendue position de « leader du monde musulman ».
« Le sommet de Kuala Lumpur marque le début d’une série d’efforts destinés à mettre sur pied une nouvelle source dans le monde musulman », indique l'article de Rai al-Youm.
Évoquant l’absence du Premier ministre pakistanais Imran Khan, Atwan écrit : « Imran Khan semble s'être laissé influencer par les promesses financières des Saoudiens lors de sa récente visite à Riyad. D’autre part, la participation du président iranien Hassan Rohani a exclu toutes les rumeurs selon lesquelles ce sommet serait de nature "communautaire" et lui a plutôt donné un aspect de sommet musulman, c’est-à-dire un représentant du monde sunnite aussi bien qu’un représentant du monde chiite ».
Et d’ajouter : « Le sommet de Malaisie réunit six pays dont cinq figurent parmi les pays musulmans non arabes, les plus peuplés. C’est-à-dire, la Malaisie, l’Indonésie, l’Iran, la Turquie et le Pakistan. Selon le conseiller du président turc, ces pays partagent un point commun ; leur économie ne s’appuie pas sur les ressources naturelles, mais plutôt sur la production et les ressources humaines ».
Abdel Bari Atwan s’est ensuite attardé sur les propos du conseiller du président turc qui a critiqué ainsi les dirigeants arabes : « Où sont-ils ? Pourquoi sont-ils absents toutes les fois où le monde musulman est sujet à un danger ? Pourquoi ne passent-ils pas à l’acte lorsque l’islam est menacé par l’animosité ? Au contraire, ce qu’ils font renforce les animosités contre l’islam ».
Atwan a ajouté que les propos du diplomate turc étaient de pures réalités : « Le camp arabo-islamique vit ses pires jours. Viennent à l’appui de cette affirmation les divergences, les conflits, la guerre, la corruption, le despotisme, la répression et le suivisme aveugle aux puissances colonialistes occidentales et américaines ainsi que le compromis flagrant des dirigeants arabes avec le régime israélien ».
Pour Abdel Bari Atwan, « le recours des pays arabes à leurs médias pour dénoncer le sommet de Kuala Lumpur est un signe de désarroi. L’Arabie saoudite, si elle désire garder sa position de leader du monde musulman, devra réviser la plupart de ses politiques y compris celle concernant la guerre au Yémen ainsi que son suivisme aveugle aux États-Unis et il faudra qu’elle défende l’équité dans le monde ainsi que la cause palestinienne ».
Atwan a indiqué que l’Organisation de coopération islamique que le sommet de Kuala Lumpur souhaite remplacer par d’autres alternatives n’était plus qu’un nom et qu’elle ne cristallisait plus une vraie coopération entre les pays islamiques. « Le pays qui abrite le siège de l’OCI n’agit pas impartialement et il s’est laissé transformer en un département du ministère saoudien des Affaires étrangères. Le rôle de l’OCI se borne aujourd’hui à la publication d’une poignée de déclarations ».
« Celui qui souhaite diriger le monde musulman devrait servir de modèle à suivre pour tous dans divers domaines dont le développement, la démocratie, les droits de l’Homme, l’égalité sociale, la souveraineté nationale, l’éradication de toutes formes de la corruption et les efforts pour rapprocher les musulmans », indique Abdel Bari Atwan.
Et de conclure : « Le sommet de Malaisie constitue une sonnette d’alarme pour les dirigeants de tous les pays arabo-musulmans, notamment pour l’Arabie saoudite qui devra changer de cap. Aujourd’hui, le sommet de Malaisie a contourné l’OCI et demain, nous pourront être surpris par une demande pour retirer à l’Arabie saoudite son rôle de superviser les lieux saints des musulmans. Le sommet de Kuala Lumpur n’est qu’un début ».