Déjà un an s'est écoulé depuis le début de l'agression du Yémen par l'Arabie saoudite. Elle visait à reconduire le président en fuite Mansour Hadi au pouvoir, mais il n'en est toujours rien.
L'explosion survenue jeudi dernier à Aden l'avait contraint de quitter la ville en direction de Riyad où il semblerait que son séjour s'éternise.
Samedi, des milliers de Yéménites manifestaient dans la capitale Sanaa en protestation contre la coalition sous commandement saoudien, justement un an après le début de sa campagne contre les insurgés. "Ensemble contre l'agression tyrannique saoudienne", indiquait une grande banderole affichée sur la place Sabine à Sanaa, bondée de manifestants. La manifestation avait été appelée par le Congrès général du peuple, le parti de l'ancien président allié aux rebelles Ali Abdallah Saleh. Ce dernier était apparu brièvement lors du rassemblement, selon le photographe de l'AFP.
Cette manifestation a largement remis en question la légitimité de Mansour Hadi, selon l'éditorial du journal Ray al-Youm signé par le célèbre analyste du monde arabe, Abdel Bari Atwan :
Il y a 5 ans, la révolution au Yémen a conduit à la chute du gouvernement d'Ali Abdollah Saleh, qualifié de "dictateur corrompu" par les révolutionnaires. Mais cette interprétation ne semble plus avoir de sens. Elle appartient dorénavant au passé puisqu'une nouvelle révolution a germé dans les rues du Yémen, rétrocédant à Saleh sa légitimité perdue et insufflant à son peuple de nouveaux penchants politiques.
Le peuple yéménite s'est prononcé en faveur de son ancien président Saleh et du mouvement Ansarallah dont la côte de popularité ne cesse de grimper dans le contexte actuel, au détriment de leurs ennemis saoudiens à la tête desquels se pavanent Hadi et son gouvernement.
Les récentes déclarations de Saleh et du leader d'Ansarallah, Abdul-Malik Houthi, se rejoignaient sur un point : l'Arabie saoudite fomente tous les conflits et toutes les souffrances au Yémen, en Syrie, en Irak et en Libye et notamment les affrontements interethniques au Yémen. Mais selon Ray al-Youm, Houthi s'est démarqué dans sa critique conservatrice de l'Arabie saoudite, restant ainsi fidèle à l'accord de cessez-le-feu signé entre les deux parties. D'autre part, le régime saoudien s'abstient de répondre directement au réquisitoire de Saleh et préfère l'ignorer. Cette politique de l'ignorance empruntée à l'Angleterre lui permettrait de semer la zizanie entre les deux acolytes Ansarallah et Saleh.
L'éditorialiste Abdol-Bari Atwan est persuadé que Saleh, fort d'une expérience de 30 années au pouvoir, homme idoine pour fédérer les nombreuses tribus qui composent le Yémen, n'aurait jamais haussé le ton contre l'Arabie saoudite s'il ne doutait pas de l'inefficacité de l'opération dite "Asifat Al-Hazm" (Tempête décisive) qui a fait jusqu'à présent des milliers de morts et de blessés. Agression qui a incité le peuple yéménite à serrer les rangs face aux meneurs de la coalition arabe.
Néanmoins, dans son nouvel élan révolutionnaire, les Yéménites, peuple qui s'est soulevé contre la corruption et la tyrannie en vue d'accéder à la démocratie et la liberté, n'ont nullement l'intention de replonger dans leur passé nauséabond. Connu pour son courage et sa dignité, il proteste contre l'ingérence militaire et politique de l'étranger avec en priorité, l'établissement d'un ordre démocratique basé sur la justice sociale, la cohabitation pacifique des différentes ethnies et religions et l'application des droits de l'homme.