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"Les mesures prises par Trump, ont rendu service davantage à la Syrie et à l’Iran qu’à Israël"(Olmert)

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
La patrouille conjointe des forces américaines et turques dans le nord est de la Syrie./AFP

Si les forces US quittent la Syrie, comme l'a promis le président américain, ce ne sera peut-être pour mettre un terme à leur hégémonie au Moyen-Orient. Ceci étant, ce semblable retrait intervient à l'un des pires moments qui soit pour Israël, à en croire l’ancien Premier ministre israélien et architecte de la guerre de 2006 contre le Hezbollah, Ehud Olmert. Pourquoi? 

Dans un article publié dans le journal Jerusalem Post, Olmert affirme que contrairement à ce que de nombreux Israéliens croyaient, "les mesures prises par le président actuel des États-Unis, Donald Trump, ont rendu service davantage à la Syrie et à l’Iran qu’à Israël".

« En déséquilibrant la situation géopolitique du Moyen-Orient, Trump n’a pas mis Israël dans une situation favorable. Il l’a rendu plus fragile que jamais. Commençons par sa décision de transférer l’ambassade des États-Unis de Tel-Aviv à Qods, ou par sa reconnaissance de la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan, et bien ce sont des gestes dépourvus de toute substance. Nous avons annexé les hauteurs [du Golan] en décembre 1981, il a 38 ans. Les déclarations de Trump ont simplement provoqué davantage de controverses sur le contrôle du Golan par Israël, attirant l’attention de la communauté internationale sur une chose qu’elle avait grandement ignorée.

Pire, cette région stratégique abrite désormais des bases appartenant aux forces pro-iraniennes, ce qui est loin de réconforter notre position militaire », affirme Olmert selon qui "il n’y a aucune contradiction dans la stratégie de Trump puisque toutes ses actions sont dictées par l'impératifs de réduire l’implication de Washington en dehors des frontières américaines": « Pourquoi devons-nous être surpris du retrait des militaires américains de Syrie? Je ne sais pas si c’est bon ou mauvais pour les États-Unis, mais en ce qui concerne Israël, c'est une très mauvaise nouvelle et cela nous apprend que nous devons compter sur nous-mêmes ».  

L'ex-Premier ministre israélien qui fait écho à l’inquiétude et à la déception d'une grande partie de la société israélienne après l'annonce du retrait US de Syrie, revient ensuite au dada de tous les Israéliens à savoir la présence militaire de l'Iran en Syrie, non loin des frontières de la Palestine occupée : 

« La plus grande défaite d’Israël en matière de défense et de sécurité et la plus grave depuis la guerre de Kippour, il y a une cinquantaine d’années, c’est que nous avons permis aux Iraniens de s’installer durablement en Syrie. Dans l'est syrien où les pro-Iraniens sont présents, le coup anti-Kurde de Trump ne passerait pas inaperçu. Comment voulons-nous désormais que les FDS nous fassent confiance à Deir ez-Zor maintenant qu'elles se sentent trahies par les Américains? Tout ceci ne fait qu’offrir une plus grande marge de manœuvre à Téhéran et l'autoriserait à mener des actions en profondeur en Syrie, avec l’espoir que l’avenir d’un règlement assurera la permanence iranienne dans ce pays », a-t-il affirmé en accusant Benyamin Netanyahu d’avoir suivi une politique faible, une sorte de politique de la peur.

Cette politique de peur, Olmert l'a toutefois vécu lui-même en 2006 quand une semaine après le début de la guerre contre le Hezbollah et la destruction du premier destroyer israélien et les premiers Merjava de l'armée israélienne, il a demandé par des intermédiaires arabes au Hezbollah de cesser sa résistance. 

En Israël, le sort réservé aux Kurdes est vécu comme un traumatisme dans la mesure où le projet d'un Kurdistan indépendante devait reprendre point par point le processus de fabrication de l'entité sioniste. Dans une note publiée sur le site de l’institut américain Brookings, Eyal Tsir Cohen, expert des relations internationales, estime que la décision de Donald Trump d’abandonner ses alliés kurdes syriens seuls devant l’agression militaire turque, devait amener les dirigeants israéliens à repenser sérieusement leur "alliance avec Washington". Selon Eyal Tsir Cohen qui évoque  la "guerre froide" contre l’Iran, cette guerre a rapproché Israël et les régimes "modérés arabes": « Mais Trump a tout fait pour y porter atteinte. Son refus de riposter à la destruction par l'Iran d'un Gloabn Hawk américain, puis cet autre refus de riposter à l'attaque contre Aramco saoudien, ont presque réduit à néant tout intérêt d'une alliance Israël/régime modéré arabe. Ces régimes en sont désormais à vouloir à négocier avec l’Iran pour trouver un règlement. Le prince héritier saoudien a déjà envoyé les Premiers ministres irakien et pakistanais à Téhéran pour négocier avec les Iraniens. Si les choses avançaient dans ce sens, les Arabes pourraient se démarquer d’Israël et tout sera perdu ».

En ce qui concerne la Russie, Eyal Tsir Cohen écrit : « Bien qu’il soit encore très tôt pour parler d’une "allégeance" des Kurdes de Syrie envers la Russie pour ainsi profiter de la protection de Moscou face aux Turcs, il faut admettre aussi que les Russes pourraient eux aussi profiter de la décision de Donald Trump. »

Cohen écrit : « À la lumière de la décision américaine de se retirer du nord-est de la Syrie, les Kurdes pourraient finir par demander l’aide de la Russie voire de l'Iran. Le prix de ce soutien russe sera élevé car Moscou insistera alors pour que les Kurdes acceptent le rétablissement du contrôle de Damas sur la région ; ce qui signifie que l’autonomie kurde partira en fumée. Moscou obtiendra le soutien des Kurdes avec zéro effort et des millions de dollars investis par les Occidentaux (combiné au soutien logistique d'Israël, NDLR) pour armer les Kurdes, leurs infrastructures et leurs champs de pétrole tomberont gratuitement entre les mains des Russes et des Iraniens. »

Pour Israël, la domination croissante de la Russie ne plait pas à Israël : En effet cette présence en Syrie créera des obstacles devant la capacité d’Israël à mettre en œuvre sa tactique de "campagne de l’entre-deux guerres" contre le Liban et la Syrie pour s’assurer de sa supériorité stratégique au niveau régional, surtout que sur les frontières syriennes avec l'Irak, la Russie donne l'impression d'avoir rejoint les efforts iraniens. 

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV