Le premier choc passé, l'heure est au bilan. La destruction en plein ciel du sud iranien de l'un des drones-espions les plus sophistiqués du Pentagone a poussé les spécialistes militaires américains à revoir leur copie du fond en comble. Dans son numéro du 13 juillet, The National Interest y revient reconnaissant les failles du "secteur de reconnaissance aérien" des États-Unis. Le journal écrit :
" La destruction d’un drone de surveillance de la marine américaine le 20 juin 2019 met au grand jour la failles des unités de reconnaissance et de surveillance du Pentagone. Dans ce domaine, outre quelques véhicules classifiés, l’armée américaine a notamment recours à des aéronefs lents et sans pilote, pour le renseignement, la surveillance et la reconnaissance. Il met quatre heures pour atteindre son altitude maximale et a une endurance de 32 heures et emporte trois senseurs électro-optiques. Et malgré cela, ces systèmes ISTAR sont vulnérables. Leur vulnérabilité s'est manifestée le 20 juin face aux dernières défenses aériennes iraniennes et on est en droit d'en croire autant de la défense aérienne chinoise et russe, ajoute le journal. ISTAR (ISR en anglais), c’est l’acronyme de Intelligence, Surveillance, Target Acquisition, & Reconnaissance. Il s'agit d'unités de reconnaissance et de renseignement le plus souvent "multi-senseurs" regroupant dans la plupart des cas, le renseignement d'origine humaine et électronique."
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Le magazine américain d'ajouter : "Il y a quelques jours, les forces aérospatiales du Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) ont abattu un drone de surveillance, Global Hawk, de fabrication américaine, volant dans l’espace aérien iranien près du détroit d’Hormuz. Le Commandement central américain a précisé que le drone est un appareil de surveillance maritime de zone étendue, une variante navale et un prototype du Global Hawk de taille 737. Le BAMS-D, équipé de caméras et d'un radar, est conçu pour basculer entre les hautes et les basses altitudes, balayant alternativement de vastes zones pour les navires puis les identifiant individuellement".
Pour les États-Unis qui traversent une période de forte tension avec l'Iran, tension qui risque de déboucher sur une guerre maritime, ce n'est pas forcement une bonne nouvelle. Depuis 2008, Northrop a construit quatre BAMS-D et l'Iran en a abattu un. Cela pourrait remettre en cause les projets de l’US Navy qui se prépare à déployer la version navale complète du MQ-4C du Global Hawk à partir de fin 2019. En tout cas, deux de ces appareils sont stationnés aux Émirats arabes unis. Les cercles militaires américains ne croyaient pas l'Iran capable d'intercepter un drone volant jusqu'à 65 000 pieds et qui est hors de portée de nombreux systèmes de défense antiaérienne. Surtout que le BAMS-D est subsonique et dépourvu de fonctions furtives ; ce qui le rend vulnérable aux missiles sol-air les plus puissants.
Les forces iraniennes ont affirmé avoir utilisé le missile sol-air « Khordad 3 » pour abattre le BAMS-D. Le CGRI possède également des systèmes de défense antiaérienne Bavar 373 qu'elles ont fabriqué sur le modèle des S-300. Tout ceci nous promet une difficile passe pour les semaines à venir, rappelle The National Interest.
"Au fait, l'US Navy compte dans cette gamme de nombreux appareils qui risquent d'être interceptés par la DCA iranienne, largement inconnue pour les États-Unis : Des avions d’espionnage U-2 de l’US Air Force, des avions de renseignement électronique RC-135, le Boeing E-3 Sentry, les drones RQ-4 et MQ-9 ainsi que les avions de patrouille de l’US Navy, de type MQ-4s et P-8, des centaines aéronefs au total, sont tous qualifiés par les militaires de «non pénétrants» ; ce qui signifie qu'ils sont vulnérables aux défenses anti-aériennes haut de gamme. Les seuls véhicules ISTAR pénétrants au sein de l’armée américaine que nous connaissons sont un petit nombre de drones furtifs RQ-170 et RQ-180 subsoniques. Fin 2018, une nouvelle stratégie ISTAR a été mise en place par le Pentagone appelant à plus de véhicules capables de survivre. Mais cette stratégie demande du temps pour devenir bien effectif. En attendant, les Iraniens risquent de nous réserver bien des surprises".