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Pourquoi l'Iran a rendu public son dialogue avec les talibans ?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Rencontre entre les autorités iraniennes et les talibans, à Kaboul, en Afghanistan, en décembre 2018. ©IRNA

Les négociations entre les talibans et les États-Unis sont dans un halo d’incertitude. L’émissaire des États-Unis pour l’Afghanistan Zalmay Khalilzad n’est même pas sûr que les talibans respectent ce qu'il qualifie d'accord de paix. En effet les Américains ont perdu la guerre en Afghanistan. Mais cet échec est loin de leur servir de leçon. Tout au long de l'été 2018, les forces US ont évacué des centaines de terroristes de Daech de Syrie et d'Irak à destination de l'Afghanistan avant de les masser sur les frontières iraniennes et russes. S'en suivirent alors des centaines d'attentats visant la population Hazaras dans des régions proches des frontières iraniennes. Alors, la question, pourquoi l'Iran négocie-t-il avec les talibans ? et pourquoi surtout il tient à ce que ces négociations soient rendues publiques? L'analyste Pirmohammad Molazeh répond. 

Aussi bien le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif que le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale du pays Ali Chamkhani ont revendiqué le droit iranien à négocier avec les talibans afghans, bien que ces derniers aient agi par le passé contre les intérêts iraniens (meurtre de diplomates iraniens en 1998 à Mazari-i-Sharif). Mais pourquoi?  

Il y a dans ce geste un double message à la fois à l'adresse de Kaboul et de Washington : « Vous ne pouvez pas nous contourner et l'Iran ne sera pas pris de court ! »

En effet, il y a de très sérieuses analyses selon lesquelles Daech a une nouvelle mission après avoir échoué au Moyen-Orient et perdu une grande partie de son territoire. Selon ces analystes, les États-Unis et Israël travaillent ardemment à recaser Daech tout près des frontières iraniennes et russes. Pour le reste, Daech ne cesse d'accuser l'Iran et la Russie comme étant responsables de la défaite de son "califat".

Selon des informations bien fiables, les chef daechistes qui ont combattu en Syrie et en Irak, tels que les groupes armés ouzbeks, le Mouvement islamique du Tadjikistan, le Mouvement islamique du Turkestan ou le front tchétchène, ont été ou sont transférés en Afghanistan. Les Américains largement impliqués dans ce trafic, les ont déployés dans deux régions, l’une au nord près de la frontière sécuritaire sino-russe, et l’autre à l’ouest de l’Afghanistan, près des frontières orientales de l’Iran. À l'aide des Américains, Daech est à même de reprendre pied en Afghanistan. 

En effet, ce sont les Russes qui ont évoqué pour la première fois que les États-Unis se servaient de Daech pour « corriger le comportement de la Russie, de la Chine et de l’Iran ». L’émissaire du président russe pour l’Afghanistan a explicitement affirmé que la Russie disposait des informations selon lesquelles des hélicoptères américains transféraient, pendant la nuit, des éléments de Daech vers le nord d’Afghanistan.

Pour l'analyste, les Iraniens n'excluent pas non plus, tout comme les Russes et les Chinois, la possibilité qu'à l'avenir, les États-Unis utilisent Daech à leur encontre. Les autorités iraniennes reconnaissent d'ailleurs que Daech cherche à s’infiltrer en Iran et que de multiples opérations antiterroristes ont été menées en ce sens.

Mais quel rôle accordent les Iraniens aux talibans dans ce processus bien complexe? « En effet, l’Iran exige que les talibans barrent la route à Daech et lui empêchent tout accès aux régions frontalières iraniennes. L’Iran est un acteur régional qui partage de longues frontières avec l’Afghanistan (depuis la province du Khorassan du nord jusqu’à la province du Khorassan du sud, NDLR) et la sécurité de ces frontières est une priorité pour l’Iran ».

Par ailleurs, le fait que l'Iran dialogue avec les talibans est aussi un défi que le pays lance aux soutiens régionaux d'al-Qaïda. L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Pakistan sont les trois pays qui reconnaissent les talibans et fournissent des ressources financières pour leur approvisionnement en armes. Et il va sans dire qu'en tant que l'un des acteurs les plus importants de la région, l'Iran ne peut pas reléguer au second plan le dossier afghan, conclut l'analyste. 

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV