En Arabie saoudite, grand allié des États-Unis dans le Moyen-Orient, la question de la succession au trône représente un facteur d’instabilité pour toute la région.
Le 21 juin 2017, le roi Salmane d’Arabie saoudite a décidé de changer de prince héritier. À la place de son neveu Mohammed ben Nayef al-Saoud, il a nommé son fils Mohammed ben Salmane, selon la revue en ligne Vzgliad.
Depuis, Ben Salmane dirige de facto le royaume, bien que son père, âgé 81 ans, est toujours le souverain d'Arabie. Vice-prince héritier et ministre de la Défense, Ben Salmane est donc fin prêt pour accéder à la trône. Selon des informations non officielles, 31 des 34 membres du conseil qui dirige le royaume, auraient voté pour le prince. À première vue, la passation de pouvoir devrait se dérouler sans accroc, même si des couacs existent et que des voix hostiles dénoncent par ci par là le coup d’État interne qu'a mené Ben Salmane. Figure au nombre de ces voix, celle de Ben Nayef, grand perdant du scénario qui se joue à Riyad. Or Ben Salmane ne serait plus seul. Aux États-Unis, on commence à douter des compétences du prince héritier.
Vzgliad renvoie ensuite à un article du New York Times et écrit : «C’est sous la pression que Mohammed ben Nayef a dû renoncer au trône au profit du fils du roi et ceci n'est pas forcément une bonne chose puisque la concentration du pouvoir entre les mains de Mohammed ben Salmane mettrait en péril les relations avec les USA dans le domaine de la sécurité ». Selon The New York Times, "le changement d’héritier du trône s’est opéré un mois après la visite de Donald Trump en Arabie saoudite. Il est aussi survenu deux semaines après le début du conflit entre Riyad et Doha".
Et le journal russe d'ajouter : "Même si Ben Salmane a été une figure clé dans les pourparlers avec Trump, de nombreux responsables américains le voient d’un mauvais œil. Ils pourraient ne pas apprécier ce personnage ambitieux qui a affaibli des clans pro-Washington à Riyad et qui ne réussit aucune des missions qui lui est confiée. "
Vzgliad se réfère encore au journal américain The New York Times pour évoquer la perception US des déboires de Ben Salmane au Yémen et ce qu'en pense le pro-américain Ben Nayef :
« Ben Nayef s’opposait à l’ingérence militaire saoudienne au Yémen, ainsi qu’à l’embargo contre le Qatar activement promu par Ben Salmane. Contrairement au nouveau prince, l’ancien s'en foutait de son image auprès des jeunes et des femmes mais bénéficiait d’un large soutien des USA et d’autres pays occidentaux et arabes. Les États-Unis craignent une importante concentration du pouvoir entre les mains de Mohammed ben Salmane, personnage imprévisible voire incontrôlable. »
Pour le journal russe, qui cite toujours The New York Times, l’inquiétude américaine s'expliquerait surtout par le fait que Washington pourrait un jour ne plus avoir aucun levier de pression à exercer sur Mohammed ben Salmane — ce qui est sans précédent en 70 ans de relations saoudo-américaines . Le problème est que Riyad de Ben Salmane veut dominer tout mais il n'en a pas les moyens. Ben Salmane souhaite mener une politique autonome tout en étant conscient qu'il n'est rien sans les États-Unis. Cette schizophrénie a poussé Ben Salmane à se tourner vers la Russie. En deux ans, il s’est rendu quatre fois en Russie et son dernier entretien avec le président russe Vladimir Poutine date de moins de deux mois. Désormais, il doit organiser la visite de son père à Moscou — reportée depuis automne 2015 à cause du la Syrie. Fin juin, la presse arabe écrivait que cette visite pourrait avoir lieu en mi-juillet, mais ce délai est déjà dépassé et aucune annonce n’a été faite ni à Moscou ni à Riyad. Une chose est certaine: les Américains ne verraient pas d'un bon œil cet incartade. Pour eux, cette visite à Moscou est un désaveu à leur encontre".