Les généraux israéliens réunis à Herzliya devront mettre des années à analyser ce qui s’est passé au Golan, le 10 mai, entre minuit et 2 heures: leur défaite dépasse tout simplement leur entendement.
Depuis l’attaque israélienne contre T4, le 9 avril, qui a coûté la vie à sept conseillers militaires iraniens, Israël attendait la riposte : il avait même placé son armée en état d’alerte maximale sur une vaste étendue allant de Haïfa, Israël-nord en passant et incluant Nahariya, Safed et le Golan. Les congés des soldats avaient été annulés et les sirènes d’alerte, prêtes à retenir à tout instant. Le Renseignement israélien, les militaires comme les civils, n’avaient pas baissé un seul instant la garde, surveillant à plein régime le ciel du nord de la Palestine, du sud du Liban et du sud-est de la Syrie via d’incessantes opérations de patrouille pour éviter toute « désagréable surprise ». Or, cette surprise est tombée du ciel le 10 mai sans qu’Israël soit capable d’en prévoir ni l’heure, ni l’ampleur, ni même le lieu.
La riposte de la Résistance a duré, en termes d’heures, bien plus que les frappes israéliennes du 9 avril contre T4 ou encore les tirs de missiles tripartites USA/France/Grande-Bretagne du 14 avril contre les cibles en Syrie. Elle a été à la fois " concise", "efficace" et "focalisée". Si l’armée israélienne est ce qu’elle prétend être, l’opération du Golan n’aurait pas dû avoir lieu, elle n’aurait pas dû non plus, durer des heures. Ceci revient à dire que l’axe de la Résistance a superbement su détourner la vigilance des appareils de surveillance d’Israël, agissant suivant le principe ô combien décisif de surprise et sur une vaste zone aussi grande que le Golan occupé.
Mais, la riposte n’a pas été qu’une défaite du Renseignement israélien : ces dernières années, Tel-Aviv a dépensé des dizaines, voire des centaines, de milliards de dollars pour barricader le Golan, ce lieu hautement symbolique où l’armée arabe a cédé la partie à Israël en 1967. Les 67 missiles tirés contre les dix cibles israéliennes n’ont pas été interceptés ou si peu, Dôme de fer, Fronde de David et autres gadgets du fameux bouclier ayant lamentablement échoué.
Incapable de contrer le déluge de missiles qui a laissé un lourd bilan coté israélien, Tel-Aviv a attendu, hébété, la fin de l’attaque pour lancer ses 28 « F-15 » et « F-16 » bomber « les bases iraniennes » en territoire syrien. Tel-Aviv dit avoir réduit en cendres ces « bases » sur un champ d’action pas plus large que quelque 150 kilomètres carrés. Pas une seule image-satellite en revanche de supposées bases iraniennes écrasées sous les bombes et missiles, alors qu’Israël a habitué le monde à bomber le torse pour des « performances » dix fois moins importantes. Tout ce que l'armée israélienne a publié est une grotesque vidéo que Tel-Aviv dit avoir tournée sur un site de batterie « Pantsir » syrien :
Curieuse authentification pour un régime israélien qui se dit capable de percer le programme nucléaire secret iranien, quitte même à en dévoiler 55 000 fichiers d’un coup et lors d’un inoubliable numéro de « Bibi Show ».
La réalité est que les raids israéliens du 10 mai, déclenchés dans la précipitation et après l’attaque contre le Golan, n’ont touché ni l’Iran ni le Hezbollah. Le bilan des pertes infligées à l’armée syrienne à Quneïtra ne fournit pas non plus de motif de fierté à Israël : trois soldats syriens morts et cinq soldats syriens blessés.
La réalité est aussi qu’aux premières minutes suivant la riposte de la Résistance, Netanyahu s’est précipité, d’après les sources bien informées, sur la combine pour appeler Moscou, puis Londres, Bern, Paris et Washington, croyant avoir à faire face à « la Grande bataille » Israël/Résistance. Il a tenté de la sorte de stopper l’escalade avant qu’il ne soit trop tard. Mais l’embrasement du 10 mai au Golan n’était pas la « Grande guerre », mais une « bataille » qui donne une petite idée de ce que pourrait être la vraie Grande guerre.
De Moscou à Washington en passant par Londres et Paris, les « amis » d’Israël se sont contentés d’appeler à la désescalade, signe que Tel-Aviv s’est lourdement trompé d’avoir poussé loin la rhétorique guerrière et sa débilité à jouer avec le feu, en comptant naïvement sur le soutien de l’Occident…Au demeurant, le 10 mai a été riche en enseignements : au Moyen-Orient, rien ne se fera plus sans que soit pris en compte le facteur « Résistance » et ce, avec ou sans les S-300.