Au Nigeria, les attaques meurtrières des derniers jours et des enlèvements massifs illustrent les défis sécuritaires auxquels ce pays africain fait face et rappellent que la crise reste incontrôlable. En l’espace de deux jours, des hommes armés ont attaqué une église évangélique dans le Centre, et un lycée pour filles dans le Nord-Ouest, faisant plusieurs morts.
Dans la nuit du mardi 18 novembre, des hommes armés ont pris d’assaut une église, dans la ville d’Eruku, dans l’État de Kwara, tuant au moins trois personnes et enlevant le pasteur ainsi que plusieurs fidèles, a annoncé mercredi la police du Nigeria.
L’attaque a été filmée par une caméra de l’église qui enregistrait la messe. La vidéo, qui a suscité une vive émotion sur les réseaux sociaux où elle a été diffusée, montre une vingtaine de fidèles interrompant leurs prières au son de détonations d’armes à feu provenant de l’extérieur de l’église. Des cris d’enfants y sont entendus.
Ensuite, un homme armé chasse les fidèles cachés derrière des rideaux et des meubles de l’église tandis que plusieurs autres dérobent les sacs et les effets personnels abandonnés sur les bancs, pendant que les tirs se poursuivent.
« Les policiers, en collaboration avec des vigiles, ont rapidement réagi aux coups de feu provenant de la périphérie de la ville, ce qui a poussé les malfaiteurs à s’enfuir dans la brousse », a expliqué la police de l’État de Kwara dans un communiqué diffusé dans la nuit.
Pour sa part, le gouverneur de l’État de Kwara, AbdulRahman AbdulRazaq, a demandé que des renforts de sécurité supplémentaires soient déployés de toute urgence.
Le fléau des enlèvements
Au cours de la décennie écoulée, les écoles du nord du Nigeria sont devenues des cibles privilégiées des groupes armés, qui procèdent souvent à des enlèvements afin d’obtenir des rançons ou de négocier avec le gouvernement.
Lundi encore, un enlèvement massif d’élèves a été perpétré, dans la nuit du 16 au 17 novembre, dans l’État de Kebbi par un gang criminel, faisant un mort et un blessé.
La police nigériane a annoncé le meurtre du directeur adjoint de l’école secondaire publique pour filles de Maga et l’enlèvement de 25 lycéennes par des hommes armés. Un agent de sécurité a également été blessé. Les assaillants ont envahi l’établissement, échangé des tirs avec les policiers en poste, puis ont escaladé la clôture pour pénétrer dans les dortoirs et enlever de force plusieurs jeunes filles, ensuite emmenées dans la brousse.
Une équipe composée de policiers, soldats et milices civiles a été déployée et passe au peigne fin les itinéraires empruntés par les bandits et la forêt voisine afin de retrouver les élèves et d’arrêter les auteurs de cet « acte ignoble », a déclaré la police de Kebbi.
Les forces armées nigérianes sont toujours à la recherche de la vingtaine de lycéennes kidnappées.
À ce propos, le commissaire à l’information de l’État de Kebbi, Alhaji Yakubu Ahmed a indiqué que l’une des lycéennes a pu s’échapper lorsqu’elle a été traînée de force, il en reste donc 24 pour le moment.
Cette attaque fait écho à de nombreux autres enlèvements d’écoliers au Nigeria, dont la plus importante, entre 2014 et 2017, avait donné lieu à un mouvement de solidarité mondiale après le rapt de 300 jeunes lycéennes par Boko Haram. Mais chaque année ou presque, les attaques se poursuivent : en 2024, ce sont 137 enfants qui avaient été kidnappés au sein de leur école, puis finalement libérés.
Les gangs terrorisent depuis des années les habitants du centre et du nord-ouest du Nigeria. Le premier enlèvement massif d’élèves dans l’État de Kebbi remonte à 2021, lorsque des assaillants avaient tué un policier, blessé un enseignant et kidnappé plus de 100 élèves du Federal Government College (FGC) de Yauri. Certaines jeunes filles, mariées de force, n’avaient été libérées qu’avec leurs enfants.
À l’origine, l’insécurité dans le pays découlait des conflits liés à l’exploitation des terres et de l’eau entre éleveurs et agriculteurs. Elle s’est progressivement transformée en violences perpétrées par des bandes criminelles imposant leur loi dans des zones rurales dépourvues de sécurité étatique.
Depuis 2018, l’émergence du groupe terroriste Lakurawa, affilié à Daech, dans le nord-ouest du pays a aggravé la situation sécuritaire dans la région frontalière avec le Niger.