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RCA : la France, « Etat terroriste » !
Les derniers militaires français ont fini par quitter la Centrafrique la queue entre les jambes, neuf ans après l'opération Sangaris, qui avait marqué, presque au même moment om la France avait mis la main et pour huit ans durant sur le plus grand pays du Sahel le Mali, le début de l’occupation militaire de la RCA que la France avait placée non pas sous l’étiquette de lutte antiterroriste, mais sous celle d’endiguement d’une flambée de violence « pré-génocidaire ».
Ainsi, les quelques dizaines de soldats qui assuraient encore des fonctions logistiques sur le camp de M'Poko ont tiré révérence. La rétrocession du camp, utilisé par la mission de l'ONU Minusca et la mission de l'Union européenne EUTM-RCA, elles aussi autant haïes par les Centrafricains que l'occupation française s'était déroulée, dixit la presse hexagonale, « en toute transparence ». Enfin presque. Puisque ce départ n’est pas allé sans faire de bruit et pas des moindres. Un attentat terroriste a visé presque au même moment le directeur de la maison de culture russe, Dmitry Syty, qui n’est certes pas mort, mais se bat à l’heure qu’il est entre vie et mort.
Au fait, la « Maison russe » a été inaugurée dans l'ancienne colonie française, le 1er février 2022 et Sytyi est à sa tête dès le premier jour de travail et loin d’en être au premier coup reçu. On rapporte ainsi que le 11 novembre, il a reçu un colis du Togo par la poste, qui comprenait une photographie de son fils, vivant justement en France et une note menaçant d'envoyer la tête coupée de son fils par le prochain, si « les Russes ne rendaient pas le contrôle du continent africain aux Français. » Puis le vendredi 16 décembre, un autre colis qui dès son ouverture a explosé avec un message dedans au nom de « tous les Français » à l’adresse des Russes « sortez d'Afrique ».
À quoi joue la France, cette puissance colonialiste qui pas plus tard qu’en 2010 envoyait son armée ligoter dans les palais de présidence les présidents africains souverainement élus et qui en est désormais à se comporter en bandit ? Et bien à quitte ou à double, car au train où vont les événements la « défrancisation » de l’Afrique s’accélère à un rythme incroyable : non pas céder la place, comme l’avait promis l’Élysée à la Maison-Blanche ni à une américanisation du contiennent, mais à un retour de la souveraineté des États africains. D’où cette obstination médiatique en France à qualifier toute forme de partenariat Afrique-Russie, Afrique-Chine de conquête territoriale et à s’en sentir mal au point de procéder à du terrorisme. Au fait, la RCA par où ont commencé les désenchantements français en Afrique de l’Ouest retrace à elle seule le déclin d’une puissance colonialiste qui complètement prise de court se retrouve au contact d’une Afrique nouvelle, déterminée à aller jusqu’à la confrontation militaire pour se faire restituer ses droits.
C’est ce qui se passe au Mali et au Burkina où les forces armées africaines secondées largement par les populations en sont à se renforcer pour faire l’échec à l’un des scénarios les plus inhumains qu’aient jamais joué les puissances occidentales et qui s’appelle le « terrorisme djihadiste ».
La fin de la mission centrafricaine n’augure rien de bon pour Paris qui multiplie, impuissante, les coups bas pour changer la donne évidemment sans y parvenir. Fin novembre, à Bossangoa une base militaire de l'armée centrafricaine et de ses alliés russes, ils ont eu lieu et on a raison de soupçonner la France. Depuis, le défoulement de la colère française a perdu de son intensité pour devenir des colis piégés qui expulsent. Mais dans l’un et l’autre cas, un constat s’impose, le même que fait le chef de Wagner PMC, Yevgeny Prigozhin. Il vient de demander au ministère russe des Affaires étrangères d'engager la procédure pour déclarer la France sponsor du terrorisme, ainsi que de mener une enquête approfondie sur le terrorisme par la France et ses partenaires occidentaux de l'OTAN. Et ce n’est pas Diop, le MAE malien qui dit avoir en sa possession des preuves de la complicité française avec les terroristes qui s’en plaindrait...
Niger : l'armée visée ?
Depuis son expulsion du Mali et sa position de plus en plus affaiblie au Burkina Faso, Barkhane s’est réfugié au Niger et tente le tout pour le tout afin de renforcer ses positions dans ce pays où elle n’est évidemment pas le bienvenu et où malgré le fait que cette force tente de redorer son blason en faisant croire que désormais ce sont les forces armées nigériennes qui seraient aux commandes des opérations, il est bel et bien clair pour le peuple nigérien qu’il s’agit d’un nouveau scénario afin de détourner les attentions des réelles intentions de cette force qui consistent à installer de nouvelles bases dans cette région, de piller les ressources naturelles et de semer le chaos dans le pays.
D’ailleurs en mai dernier, lorsque le chancelier allemand Olaf Scholz s’est rendu à Niamey afin d’évoquer « la coopération militaire entre le Niger et l'Allemagne », le peuple nigérien savait très bien qu’il ne s’agit que d’une tentative de plus pour pénétrer dans ce pays, une tentative en vain puisque durant ces derniers mois, des manifestations anti-France ont maintes fois été organisées par les Nigériens.
Quelques mois plus tard et en ce mois de décembre, Antje Pittelkau, policière allemande et cheffe de la mission civile de l'Union européenne EUCAP Sahel-Niger a présenté le nouveau concept de forces mobiles (CFM) mis en place au Niger.
A l’occasion de la réunion d’inauguration du comité technique, la Cheffe de Mission Mme Pittelkau a souligné l'importance de la nouvelle approche pour le renforcement de la sécurité du Niger. « Il s’agit d’un projet du Niger. C’est bien le ministre de l’Intérieur de l’époque, M. Mohamed Bazoum, qui a décidé de créer des unités mobiles. Aujourd'hui, la mise en œuvre d'un concept national englobant les trois forces de sécurité intérieure – la Police, la Gendarmerie et la Garde Nationale – se manifeste. Je suis persuadée que les Forces Mobiles sont l’avenir de la sécurité du territoire. La sécurité, c’est un travail d’équipe – on est ensemble ! »
Que le Niger renforce ses forces armées et sa sécurité, personne ne pourra dire que la décision n’est pas bonne, mais qu’un pays comme l’Allemagne s’immisce dans cette affaire, c’est une autre question qui mérite plus de réflexions.
Quand Mme Pittelkau dit que la sécurité est un travail d’équipe, elle ne parle pas d’une coopération, mais d’une ingérence, une ingérence dont toute l’Afrique en a été victime depuis des décennies, et une ingérence dont tous les pays africains notamment ceux du Sahel en ont marre et ont décidé fortement d’y faire face.
Cette « coopération » n’est donc qu’une nouvelle forme d’ingérence occidentale qui ne vise qu’à implanter de nouvelles bases et pions au Niger.
Le Niger tout comme le Mali et le Burkina et en dépit de la présence de la grande base US à Agadez, a jusqu’ici fait échec aux plans néo-colonialistes. D’ailleurs les protestations de Nigériens qui dans la foulée de la résistance des Burkinabés dans le village de Kaya à l’invasion de Barkhane ont décidé de barrer la route aux forces d’occupation portent exactement sur l’opposition à la présence des bases occidentales à travers leur pays.
Il y a effectivement une prise de conscience collective à travers tout le Sahel, qui s’étend au Burkina, au Niger et au Mali et qui fait capoter les plans B des forces d’occupation.
Burkina/Ghana : qui sème la discorde ?
L'ambassadeur du Ghana au Burkina Faso Boniface Gambila Adagbila a été convoqué à une « audience urgente » ce vendredi, au ministère des Affaires étrangères, suite aux propos du président ghanéen Nana Akufo-Addo qui a déclaré mardi, à Washington que le Burkina Faso a passé un « accord » avec le groupe russe de sécurité privée Wagner, a rapporté l’Agence d’information du Burkina (AIB, officielle).
Comment peut-on analyser cette situation ? Que se passe-t-il entre le Ghana et le Burkina ?
Luc Michel, géopoliticien, s’exprime sur le sujet.