Les répercussions de la guerre en Ukraine sur le secteur énergétique mondial ont remis au premier plan le dossier du pétrole et du gaz liquéfié au Yémen, après plusieurs signes de l'intérêt des Etats-Unis et de l'Europe à relancer les exportations du pays, suspendues depuis près de huit ans en raison des conflits. La guerre au Yémen a stoppé l'exportation de pétrole et de gaz liquéfié, qui est considéré comme l'épine dorsale de l'économie. Elle a déclenché des crises économiques et humaines successives qui ont conduit à la plus grande crise humanitaire au monde, selon le classement des Nations unies. Des responsables du gouvernement yéménite démissionnaire reçoivent depuis une semaine des messages et des signaux de la part d'entreprises économiques et commerciales européennes et américaines qui souhaitent accélérer la résolution du dossier d'exportation de pétrole et de gaz du Yémen.
Des sources yéménites ont confié à Al-Arabi Al-Jadeed que le gouvernement démissionnaire de Mansour Hadi porte une attention particulière aux messages des pays occidentaux concernant le dossier du pétrole, car sur fond de crise économique, il a un besoin urgent de ressources financières et doit fournir des réserves de charge à la banque centrale du pays et achever la rédaction du budget de cette année, qui fait face à de nombreuses difficultés en raison de la crise financière.
Wajeeh al-Salahi, expert du Centre national de recherche pétrolière, a déclaré à Al-Arabi Al-Jadeed : « Le gouvernement yéménite (démissionnaire, NDLR) prend au sérieux la question de la relance des exportations de pétrole et de gaz, sans regarder les politiques internationales actuelles, la polarisation et les conflits qui ont résulté de la guerre en cours en Ukraine, et la réticence des pays influents sur le marché mondial de l'énergie à augmenter leur production de pétrole pour couvrir le déficit subi par les marchés internationaux après de strictes sanctions occidentales contre la Russie, y compris l'embargo de Washington sur le pétrole russe. »
Le Yémen cherche à porter sa production de pétrole brut à environ 150 000 barils par jour en cas de réexportation, contre 70 000 barils par jour actuellement, selon les estimations du gouvernement.
Cependant, Abdul Wahed Al-Aubali, chercheur en économie pour Al-Arabi Al-Jadeed, a déclaré que « les performances ratées du gouvernement et la corruption endémique mettraient fin à tout espoir que le Yémen bénéficierait de toute augmentation de la production de pétrole et des sauts de prix actuellement enregistrés ».
Al-Abuali a ajouté que « le Yémen exporte un baril d'environ 100 dollars puis revient l'importer avec environ 300 dollars sous forme de dérivés du pétrole, en raison de la perturbation délibérée des raffineries d'Aden (sud) au profit des importateurs de dérivés du pétrole qui récoltent des milliards de ce commerce injuste pour le peuple yéménite qui vit dans un pays pétrolier. Cependant, le pétrole est importé, ce qui entraîne l'épuisement de milliards de devises fortes et l'effondrement du riyal yéménite et de l'économie en général ».
A la suite de cette visite, le département d’Etat américain a annoncé dans un communiqué que dans le cadre de ce voyage, les besoins de ces provinces et les efforts destinés à renforcer les services de base et les opportunités économiques, sur fond de défis dus au terrorisme et à la contrebande, ont été examinés.
D'autre part, l'économiste yéménite Faisal al-Nahari a déclaré à Al-Arabi Al-Jadeed que le but de ces visites est de se renseigner sur les derniers équipements et les préparatifs en cours pour relancer les exportations de pétrole yéménite de certains champs et de s’informer sur le volume des réserves et le potentiel d’exportation de ce pays, simultanément aux mesures US similaires contre certains pays pétroliers dont le Venezuela et l’Iran.
Des récents rapports et recherches géologiques font état de la découverte de vastes gisements de pétrole dans la province d’al-Jawf au nord du Yémen. Leur exploration hissera le Yémen au rang des plus grands producteurs de pétrole dans la région voire au monde.
Al-Jawf, avec sa richesse agricole et ses eaux souterraines, possède les plus grandes réserves de pétrole et de gaz au Yémen et dans la région, ce qui en fait le premier pôle de production de l'économie yéménite et en même temps le fournisseur des besoins alimentaires du pays.
En vertu d'un accord entre le gouvernement yéménite démissionnaire et la société américaine « Hunt Oil Company », un certain nombre de sociétés pétrolières internationales ont commencé à opérer dans la région de Maarib et al-Jawf au début des années 1980 pour explorer et identifier les gisements de pétrole et de gaz.
Mais malgré l’existence de dizaines de puits de pétrole de l'autre côté de la frontière en Arabie saoudite, aucune de ces sociétés n'a été en mesure d’explorer un seul puits ou champ de pétrole au Yémen.
Certaines sources disent que les chefs des tribus yéménites affiliées à l'Arabie saoudite étaient à l'origine du blocage des travaux d’exploration des entreprises internationales à al-Jawf.
Al-Jawf est géographiquement adjacente à deux grandes régions pétrolières, l'une en Arabie saoudite et l'autre dans la province pétrolière de Maarib au Yémen. De l’avis des observateurs, il y a des raisons politiques derrière l'ignorance de la région d'al-Jawf et les justifications sécuritaires ne sont qu'une excuse.
D'ailleurs, le vice-ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Salut national a accusé le Parti al-Islah d’utiliser les revenus pétroliers et gaziers yéménites pour financer l’envoi de miliciens extrémistes étrangers en Ukraine.
Hussein al-Azzi, vice-ministre des Affaires étrangères du gouvernement de salut national yéménite, a écrit sur Twitter : « Notre pétrole et gaz sont entre les mains des Frères Yéménites (Parti al-Islah), et ils s'attribuent les revenus du pétrole et du gaz ainsi qu'à certaines de leurs branches extrémistes à l'étranger. Récemment, ils ont consacré une partie de notre richesse nationale au financement du recrutement de miliciens pour combattre en Ukraine en échange de leur retrait des listes terroristes. »