Le journal libanais Al-Banna a décrit le retrait américain de la Syrie et de toute la région comme un signe de la défaite américaine en Asie de l’Ouest. « Si les Américains prolongent leur présence dans la région ils anticiperont leur effondrement », a-t-il réaffirmé. L’analyste libanais des questions politiques, Mohammed Sadeq al-Husseini revient sur le retrait des États-Unis de la Syrie et ses raisons. Au fait pourquoi les USA ont-ils annoncé leur retrait?
Tous les indicateurs géographiques, politiques et ceux de terrain, montrent que les États-Unis perdent lentement mais sûrement leur emprise sur les évolutions géopolitiques. l'élément déclencheur?
Le régime drastique des sanctions US s'est transformé en une arme qui s'est retournée contre l'Amérique pour en porter au grand jour les failles qui secouent l'hégémonie américaine en Asie de l’Ouest. Au fait en Syrie ce sont les prémices de l'effondrement de tout un empire qui se succèdent :
1- Ce dont nous sommes témoins dans le nord-est de la Syrie est loin d'être l'unique résultat de l'agression d'Erdogan et de son pari fou de vouloir engloutir par un coup de baguette magique US des pans entiers du territoire du pays voisin. C'est l'écho retentissant de la défaite subie par l'axe américano-israélien sur le théâtre des opérations au Moyen-Orient, et Erdogan et sa politique syrienne en fait partie. N’oublions pas que l'armée turque et ses mercenaires ont envahi le Nord-Est syrien à bord des chars M60 de fabrication américaine, modernisés en Israël, un total de 460 chars.
2. Le retrait US ne relève pas non plus d'un coup de tête du président américain, au contraire c'est une décision réfléchie, délibérée qui reflète la profonde défaite stratégique de l'empire US au Levant en particulier et en Asie de l'ouest en général. L'Amérique manque de sous et cela se lit à travers les mesures successives de Trump pour réduire des dépenses liés aux déplacements et à l'entretien de troupes à l'étranger.
Le retrait US du nord-est de la Syrie en annonce bien d'autres, les bases militaires américaines dans toute la région y passant bientôt. Même Israël qui reste de loin la base militaire grandeur nature US au cœur du Moyen-Orient n'y échappera pas. D'où la panique qui s'est emparé d'Israël et que ne saurait apaiser les paroles réconfortantes de Pompeo en visite vendredi dernier en Israël.
Trump l'a fait bien comprendre aux Israéliens, il ne propose plus aucune nouvelle garantie à Israël qui pourrait être largué au même titre que les Kurdes de Syrie. Est-ce un choix ? Non c'est une obligation.
La meilleure preuve en est cette mesure sans précédent des USA confirmée par le quotidien britannique The Independent selon laquelle les États-Unis ont retiré 50 bombes nucléaires B61 de la base turque Incirlik avant de les transférer à Powidz, en Pologne, à 200 km à l'ouest de Varsovie, et au port roumain de Michail Kongalniciano, situé sur la côte ouest de la mer Noire.
Totalement en déclin économique et politique, les USA sont-ils en passe de placer le front de combat anti-Russie sur le vieux continent ?
Une chose est sûre: les USA sont à la traîne, dépassés par la vertigineuse croissance économique de la Chine, et les fulgurants progrès de l'industrie d' armements sino-russes et indiens. La Russie, pour ne citer qu'elle, possède le monopole d'une quarantaine de réserves mondiales, qu'il s'agisse de pétrole, de gaz, de minéraux ou d'autres ressources naturelles telles que le bois… Ce sont là des pans entiers de puissances que les États-Unis ont ratés, en raison du gaspillage de leurs ressources financières dans les montagnes de l'Afghanistan, dans des sables du Koweït ou dans les déserts de l'Irak. Et ce retard devient désormais fatal. Le trio a devancé l'Empire qui s’écroule de son propre poids et qui semble vouloir entraîner avec lui, ses satellites.
La crise existentielle qui frappe les USA est trop profonde pour être résolue par le vice-président américain, Mike Pence, lors de sa visite éclair en Turquie, et elle ne peut pas être dénouée non plus par l'agression d'Erdogan contre le nord-est de la Syrie, dont l'une des principales causes est la tentative d'Erdogan de distraire les généraux de l'armée turque de l’arrestation et la mise en détention de leurs collègues pendant ses trois dernières années. C'est une crise que Pompeo et ses promesses en l'air faites à Israël ne pourrait pas non plus résoudre. Cette crise existentielle, les USA ne peuvent rien contre si ce n'est de l’inoculer aux autres...Et c'est d'ailleurs ce qu'ils sont en train de faire en Europe où tout s'embrase. Quant à Israël, il devra comprendre que le temps de parrainage US à son encontre est déjà derrière lui. Yediot Aharonot écrit :
" En opérant un retrait impromptu des soldats américains de la Syrie dont la présence avait force symbolique et stratégique pour l’équilibre sécuritaire de cette région, Donald Trump a porté atteinte à l’opportunité de la publication de son Deal du siècle... Et puis voilà que le gendre et conseiller spécial de Donald Trump réapparaît dans un moment qui n’est peut-être pas le plus propice à la révélation du contenu d’un plan qui a tellement tardé qu’on a fini par l’oublier. Un mauvais timing diplomatique et politique pour un Moyen-Orient qui n’en finit pas de voir se succéder les menaces de guerre. La politique de ”L ‘America First”de Trump a entraîné de gros dégâts en ce qui concerne la confiance dans les États- Unis perçus comme le paratonnerre de l’occident et le gardien de l’équilibre du monde".