Alors que la Russie accueille sur son sol la Coupe du monde 2018, le département d'État américain a mis en garde, le 15 juin, les Américains contre des attaques terroristes qui pourraient viser les stades où se déroulent les matchs du Mondial. Pourtant, les Américains n'étant pas un public qui ne s'emballe pas trop pour le ballon rond et dont la présence étant plutôt réduite à Saint-Pétersbourg, les analystes tendent à s'interroger sur le message que compte livrer Washington à travers cette "mise en garde". S'agit-il d'une menace à peine voilée?
"Les grands événements internationaux tels que la Coupe du monde constituent une cible attrayante pour les terroristes. Bien que les mesures de sécurité aient été adoptées pour la Coupe du monde, mais les terroristes pourraient chercher à attaquer des lieux tels que les stades et les zones d'observation de Fan Fest, les sites touristiques, les centres de transport et d'autres lieux publics", lit-on dans le communiqué du département d'État qui exhorte les Américains à reconsidérer les voyages en Russie, en général, en raison de la menace terroriste.
Le sombre tocsin est ainsi sonné par les Américains alors que la Russie travaille depuis sept mois à la sécurisation de la Coupe du monde. Dès 2016, la Russie a mis en place un «groupe de travail» international chargé de plancher sur la sécurité des jeux qu'ont rejoint, selon le Service fédéral de sécurité de la fédération de Russie (FSB), les services de sécurité de 32 pays, en dépit des tensions diplomatiques entre l'Occident et la Russie. Alors pourquoi cette intempestive mise en garde à l'encontre de la Russie? D'aucuns relève une étrange coïncidence. Ce même vendredi 15 juin, le département d'État s'en est aussi pris verbalement à l'État syrien qu'il a menacé de "représailles sévères" au cas où ce dernier lance son offensive, tout attendue, contre les terroristes takfiristes retranchés dans le Sud syrien, à Deraa et Quneïtra. Les Américains sont-ils sur le point de faire chanter la Russie pour la pousser à empêcher l'armée syrienne de passer à l’offensive dans le sud?
Toujours est-il qu'un groupe naval américain, dirigé par le porte-avions USS Harry S. Truman, vient d'entrer en Méditerranée dimanche dernier. Cité par Fort-russ.com, l’analyste militaire russe Konstantin Sivkov explique l’objectif possible du porte-avions.
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Il se pourrait que la force navale se soit déplacée en Méditerranée pour préparer une attaque avec des missiles de croisière et même des bombes aéronavales contre l’armée syrienne : « Je suppose qu’il s’agit en fait de la préparation d’une attaque avec des missiles de croisière. Ils pourraient aussi utiliser l’aviation pilotée. »
Il semblerait que les Américains aient aussi tiré leçon du fiasco que fut leur frappe du 14 avril contre la Syrie. Cette frappe lancée en coordination avec la France et la Grande-Bretagne s'est avérée particulièrement inefficace. D'où le recours probable des Américains à l'aviation pour protéger les missiles lorsqu’ils attaqueront, estime Konstantin Sivkov.
Selon Sivkov, les États-Unis utiliseront des drones ainsi que des avions qui attaqueront les systèmes de défense aérienne avec des missiles antiradar, " c’est-à-dire, l’ensemble des mesures pour assurer l’attaque au missile ". " Il y aura probablement une attaque contre les systèmes de défense aérienne de la Syrie, et ensuite les troupes syriennes pourraient être attaquées, mais par des avions utilisant des bombes standard ", a-t-il ajouté.
Pour les États-Unis et Israël, le moment est effectivement propice : la présence des centaines de ressortissants étrangers en Russie dans le cadre de la Coupe du monde 2018 aurait placé la Russie dans une situation fort délicate, rendant toute riposte à une attaque US/OTAN contre la Syrie, plutôt "aléatoire". Vendredi 15 juin, le président Poutine a eu aussi le droit d'entendre Netanyahu au téléphone. Celui-ci s'est à son habitude plaint de la présence iranienne en Syrie, mariant menaces aux jérémiades. La teneur de l'entretien n'est pas rapporté par les médias, mais ces derniers évoquent " la disponibilité des deux parties à coopérer en Syrie". L'annonce est pour ce qu'elle est, Moscou adopte pour le moment un profil bas en attendant que la Coupe du monde se termine, estime de son côté Hadi Mohamadi, l'analyste de la Syrie.
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" Ce qui ne veut pas dire du tout que les Russes resteront les bras croisés si l'armée syrienne est prise pour cible. La Russie a déjà réagi vendredi aux menaces anti-syrienne du département d'État. En mai, le président russe a également mis l'accent sur le maintien de la flotte russe et surtout des missiles Kalibr en Méditerranée. Il a évoqué une mission permanente de l'armada russe en Méditerranée en raison de la persistance des menaces terroristes en Syrie. Reste que la période actuelle est hautement sensible. Et les deux blocs vivent une extrême tension qui risque à tout moment de se traduire par un affrontement ", ajoute l'analyste.