Israël et l’Arabie saoudite s’échinent pour saper l’alliance russo-iranienne en Syrie, avec en toile de fond la volonté d’empêcher l’armée syrienne d’en finir avec les terroristes dans le Sud.
Quatre conseillers militaires russes ont été tués et trois autres blessés dans la province de Deir ez-Zor le 27 mai dernier, alors qu’un convoi militaire de l’armée syrienne traversait l’Euphrate.
Quatre jours plus tôt, le 23 mai, Daech avait attaqué de façon similaire l’armée gouvernementale non loin de la ville stratégique d’al-Mayadin, située dans le triangle frontalier Syrie/Irak/Jordanie. Après l’attaque, Amaq, l’agence de presse liée à Daech, a annoncé, là aussi, la mort de 23 soldats « syriens et russes ».
Quelques jours avant l’attaque du 27 mai, orchestrée visiblement par FDS interposées depuis la base américaine d’al-Tanf, la Russie a lancé un appel : elle a demandé le retrait de toutes les forces étrangères (amis et adversaires) du Sud syrien, voire de toute la Syrie, alors qu’un dialogue se déroule entre Russes d’une part et Jordaniens et Américains de l’autre sur le statut des régions du Sud.
Est-ce la fin de l’alliance Iran/Russie en Syrie ? Oui à en croire les presses israélienne et arabe. Selon Haaretz, « la Russie envisage de retirer les forces iraniennes de la frontière israélo-syrienne », car elle craint que les frappes d’Israël en Syrie finissent par miner le régime d’Assad. Le journal va encore plus loin en affirmant que Moscou « pourrait accepter de déplacer les pro-Iraniens à 60 kilomètres de la frontière israélienne ».
Et Haaretz d’ajouter : « Le changement de position de la Russie s’est produit au lendemain de l’affrontement militaire du 10 mai entre Israël et l’Iran en Syrie, dans la mesure où Moscou craint que d’autres mesures israéliennes ne menacent la stabilité du régime du président syrien Bachar al-Assad. »
En d’autres termes, Israël a fait peur à la Russie et a fini par briser en éclats l’une des alliances les plus efficaces et les plus porteuses d’espoir de l’histoire récente pour la Russie, alliance qui lui avait ouvert grand les portes du Moyen-Orient.
La thèse est pour autant absurde à un double titre :
1. La Russie n’a aucun moyen d’empêcher la présence de l’Iran en Syrie ou d’enjoindre aux conseillers militaires iraniens comment se positionner. Le gouvernement syrien n’aura aucun intérêt non plus à se détacher de son meilleur allié, l’Iran, venu à son secours avant l’arrivée de la Russie, et qui continuera à l’appuyer tant que la Syrie n’aura pas recouvré une souveraineté pleine et entière sur l’ensemble de son territoire. Si la Russie devait choisir entre l’Iran et Israël, sa décision serait probablement et en toute logique en faveur du premier et contre le second, tant est incontournable la place de l’Iran sur l’échiquier eurasiatique.
2. L’Iran a déjà annoncé qu’il ne participerait pas à la prochaine opération de Deraa dans le sud-ouest de la Syrie et l’ambassadeur iranien en Jordanie, Mojtaba Ferdowsi, l’a confirmé. Or l’annonce iranienne a été ignorée à dessein par les médias mainstream qui ont préféré se focaliser sur les appels russes au retrait des forces étrangères de la Syrie... sans comprendre le subtil manège irano-russe :
Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a utilisé la décision iranienne pour offrir un marché aux États-Unis : seules les troupes de l’armée syrienne devront être à la frontière sud du pays avec la Jordanie et Israël. « Bien sûr, le retrait de toutes les forces non syriennes doit se faire sur une base mutuelle, cela devra être donnant donnant », a déclaré le ministre russe. Les États-Unis disposent de la base frontalière d’al-Tanf, située sur le triangle frontalier de la Syrie, de la Jordanie et de l’Irak. Lors de la même conférence de presse qui s’est tenue lundi, Lavrov a accusé les États-Unis de cacher les forces de Daech dans un camp de réfugiés voisin. Quand Lavrov a déclaré que « le retrait de toutes les forces non syriennes doit être effectué sur une base mutuelle », il offrait le retrait iranien (déjà annoncé) du sud-ouest de la Syrie en échange d’un retrait US d’al-Tanf dans le Sud-Est...