La première semaine de l'année qui s'ouvre a été riche en événements. Israël s'est fait une joie de voir, sans doute un peu précipitamment, à travers la grogne sociale dans quelques villes iraniennes, les prémices d'une "révolution colorée".
En Israël, l'euphorie s'est si rapidement emparée de la classe dirigeante que le Premier ministre Netanyahu, oublieux de toutes les insanités qu'il avance régulièrement sur l'Iran et les Iraniens (menace de guerre, de bombardement...), est apparu à l'écran en personne pour appeler à la guerre civile dans les rues de Téhéran et de la province. Or cette immense joie a quelque peu distrait Netanyahu et son clan de l’un des événements majeurs qui s’est produit cette semaine et qu’analyse l'éditorialiste de Raï al-Youm, Adbel Bari Atwan : le célèbre chroniqueur revient sur l'entretien accordé par le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah à la chaîne Al Mayadeen.
L'entretien, empreint d’une extrême simplicité, contient, selon le journaliste, «quatre grandes surprises pour Israël » :
«1 Nasrallah a reconnu avoir rencontré une délégation de Fatah et s’être entretenu avec elle de la perspective d’un élargissement du soulèvement qui secoue les territoires palestiniens depuis que Washington a reconnu la judaïsation de Qods. Un soulèvement qu'appuie le mouvement de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité autonome. Et les groupes palestiniens, dans leur totalité, n'attendent que cela: un retour de l’OLP à l’option armée face à Israël maintenant que les États-Unis ont enterré tout espoir de compromis.2 Nasrallah a évoqué la guerre qu'Israël finira par imposer tôt ou tard au Liban, guerre qui sera « pleine de surprises » et qui aura "comme point de départ la Galilée" dans le nord d’Israël. De toute évidence, le Hezbollah n’aura plus une posture défensive, mais offensive.
3 À sa sortie de guerre en Syrie, le Hezbollah semble avoir pleinement pris conscience des vertus du principe de "surprise" à titre d’une tactique de combat. Le Hezbollah se réserve donc le droit de prendre de court l’adversaire et n’hésitera pas à recourir à "des armes nouvelles" qui lui garantissent la victoire.
4 Dans son entretien avec Al Mayadeen, Nasrallah a tenu aussi à souligner un point crucial dont Israël devra tenir compte : "quiconque aurait mis au pas Daech, vaincra Israël". Après tout, les soldats israéliens ne sont ni aussi coriaces que les combattants de Daech ni aussi déterminés qu'eux pour "se faire sauter" pour battre l’adversaire».
Arrivé à ce stade de l'article Atwan évoque la force qui se dégagerait d'une alliance entre les nationalistes palestiniens et la Résistance:
« Que le secrétaire général du Hezbollah entre en contact avec le Fatah, il y a là un tournant stratégique : le poids politique et militaire du Fatah est important pour le Hezbollah qui a déjà à ses côtés la Résistance palestinienne. La rencontre de Nasrallah avec les représentants du Fatah signifie à vrai dire qu'Abbas et son entourage ont noyé toute illusion de compromis avec Israël, quitte à couper les ponts avec les Américains et leurs alliés, et à se retirer des accords d'Oslo. Dans la foulée, il se peut que Washington cesse plutôt que prévu son assistance budgétaire à l'Autorité autonome palestinienne et pousse de la sorte Abbas à s'éloigner de son siège à Ramallah.
Mais pour revenir au principe de surprise si mystérieusement évoqué par Nasrallah au cours de son entretien avec Al Mayadeen, on se rappelle fort bien du destroyer israélien abattu sur les côtes libanaises en juillet 2006 (guerre Israël/Liban) alors qu'Israël ne s'y attendait pas. Ou encore de cette navette conçue par le Hezbollah qui, à en croire le commandant en chef de la marine israélienne, Eli Sharvit, est l'une des meilleures du monde, capable de porter des missiles multifonctionnels. Cette navette a même poussé les Israéliens à équiper leurs terminaux gaziers en Méditerranée de batteries de missiles anti-missiles "Dôme de fer". Le commandant du port Ashdod n'écarte pas non plus d'autres surprises comme celles qui pourraient émerger par exemple du fond des mers comme des submersibles-kamikazes ou des commandos marins qui sachent planter des mines sous l'eau, au passage des embarcations israéliennes".
Et Atwan de conclure :
" Partout au Moyen-Orient, la Résistance gagne du terrain et paradoxalement, la décision de Trump de reconnaître Qods comme capitale d'Israël a fait accélérer cette ascension. Nasrallah n'est pas du genre à faire des promesses en l'air et à prendre ses rêves pour la réalité : quand il confirme l'existence des coopérations sécuritaires entre le Hezbollah et les pays européens, il faut le prendre à la lettre. Après tout, l'arsenal du Hezbollah pourrait ne pas contenir que des armes russes ou iraniennes. Cela veut dire très clairement que l'Europe pourrait faire du Hezbollah son allié favori, dans la lutte qui est la sienne contre le terrorisme. Très mauvaise nouvelle pour Israël et ses alliés arabes qui ont longuement poussé le bloc européen à agir contre le Hezbollah".