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L'Arabie saoudite, ami ou ennemi de Washington ?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le président américain, Barack Obama, et le roi d'Arabie saoudite, Salmane ben Abdelaziz. ©Tasnim

Le Congrès des États-Unis a rejeté mercredi le veto opposé par Barack Obama à une loi autorisant les familles des victimes des attentats du 11 Septembre 2001 à engager des poursuites judiciaires contre l'Arabie saoudite.

La Chambre des représentants s'est prononcée contre le veto présidentiel par 348 voix contre 76, tandis que le Sénat avait fait de même auparavant par 97 voix contre une, celle du chef de la minorité démocrate au Sénat, Harry Reid.

C'est la première fois que le Congrès annule un veto présidentiel de Barack Obama qui subit là un important revers politique, à quatre mois de la fin de son second mandat.

Le journaliste palestinien, Abdel Bari Atwan, éditorialiste du journal en ligne Rai Al-Youm basé à Londres, a écrit que le vote très majoritaire des membres du Congrès à une loi autorisant les citoyens américains à engager des poursuites judiciaires contre le royaume saoudien au sujet des attentats du 11 septembre 2001, a eu l'effet d'un choc étant donné que les congressistes sont passés outre le veto présidentiel. "Plus surprenant, c'est la vitesse avec laquelle le Congrès a rendu inutile le veto d'Obama", estime Atwan.

Au Sénat, Harry Reid, chef de la minorité démocrate, était le seul sénateur à voter contre cette loi, ce qui témoignerait, selon l'éditorialiste de Rai al-Youm, de la méfiance, voire de la haine exprimée à l'égard d'une Arabie saoudite qui a été l'allié le plus sûr des États-Unis au Moyen-Orient et même dans le monde depuis plus de 70 ans.

"Comment expliquer qu'un seul sénateur ait voté contre une loi qui autorise à attaquer l'Arabie saoudite en justice?", s'interroge Abdel Bari Atwan.

L'auteur croit que les défenseurs du "Justice Against Sponsors of Terrorism Act" ont insisté sur la nécessité de l'existence d'un instrument de vengeance contre un allié ancien qui semble avoir perdu son utilité, bien qu'un rapport d'une commission d'enquête du Congrès avait exclu une implication directe ou indirecte de l'Arabie saoudite dans les attentats du 11 septembre 2001.

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Abdel Bari Atwan évoque ensuite l'histoire des relations entre les États-Unis et l'Arabie saoudite depuis 1945, et estime qu'avec le rejet du veto du président Obama sur "Justice Against Sponsors of Terrorism Act", les relations entre Washington et Riyad ne seraient plus les mêmes: "L'Arabie saoudite n'est plus aussi riche qu'avant, et les États-Unis ne dépendent plus pour autant du pétrole saoudien. Les relations qui étaient fondées sur "le pétrole contre la sécurité" ne fonctionnent plus, et en un clin d'œil, l'Arabie saoudite risque de ne plus être considérée comme un ami et de devenir un ennemi."

L'Arabie saoudite peut être menacée par de vives pressions politiques et des chantages financiers sans précédent, et ce à un moment où le royaume saoudien souffre d'un déficit budgétaire record, et s'est impliquée dans divers tensions régionales.

Abdel Bari Atwan rappelle que les Saoudiens ont placé 750 milliards de dollars aux États-Unis. Par ailleurs, les experts estiment que les indemnités requises pour les victimes des attentats du 11 septembre 2001 s'élèveraient à 3.3 trillions de dollars. Au cas où l'Arabie saoudite serait éventuellement condamnée à payer ces indemnités, les avoirs saoudiens sur le territoire américain pourraient être bloqués. Pour payer le reste, le pétrole saoudien serait donné aux Américains pendant des dizaines d'années.  

D'après Abdel Bari Atwan, les Américains pensent à se venger des Saoudiens pour les attentats du 11 septembre 2001 depuis longtemps: "C'est dans ce sens que Washington a encouragé l'Arabie saoudite à s'engager dans la guerre en Syrie ou au Yémen pour abandonner ensuite ses alliés saoudiens pour leur compte. Les États-Unis ne prennent pas au sérieux les menaces du ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Joubeir de retirer les pétrodollars saoudiens des banques américaines. En outre, la récente visite du prince Mohammad ben Salmane aux États-Unis n'a pas changé le point de vue de Washington. Les Américains ne comptent plus sur les revenus des contrats d'armements avec Riyad. L'establishment a décidé de se venger de l'Arabie saoudite. Les membres du Congrès n'avaient donc d'autre choix que de voter massivement pour "Justice Against Sponsors of Terrorism Act" et le veto présidentiel n'a été qu'une façade pour tromper les Saoudiens."

Abdel Bari Atwan estime que le régime saoudien aurait des jours difficiles devant lui : "Les alliances ne sont pas éternelles. Ce qu'on aime appeler "amitié avec les Arabes" n'a pas une réelle place dans la politique étrangère des États-Unis qui ont prouvé ces dernières années que lorsqu'ils décident de renverser un régime arabe, comme celui de Hosni Mouabark, ils ne songent plus au degré d'amitié avec son dirigeant."

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SOURCE: FRENCH PRESS TV